La leçon par l’écureuil gris…

Par Alain Sanders

Alertés par ce titre un peu bucolique, vous vous direz peut-être : « Il a tourné naturaliste Sanders ou quoi ? Il y a pourtant assez à faire avec la menace tsunamigratoire, non ? » Patience. Ecoutez d’abord l’histoire de l’écureuil gris.

Les écureuils gris, venus des Amériques, sont arrivés en Italie dans le début des années cinquante. Quoi de plus craquant qu’un petit écureuil qu’il soit roux, gris ou de Corée ? Le problème, c’est que les écureuils gris, très envahissants, n’ont guère tardé à proliférer et à coloniser – au détriment des écureuils roux – les régions du Piémont.

D’Italie, via les Alpes occidentales, ils sont entrés, clandestinement, sans y être invités, en France. Ils y sont très nombreux désormais. Majoritaires. De plus en plus envahissants. Ecoutons l’avis d’un spécialiste : « Les prévisions mettent en lumière la grave menace qui pèse sur la population européenne native d’écureuils roux. Les écureuils gris s’emparent de l’habitat naturel des écureuils roux et les éliminent progressivement de leur propre environnement. Ces envahisseurs provoquent également d’importants dégâts dans les plantations commerciales d’arbres et de fruits et dans les cultures céréalières. Plus la prolifération sera laissée longtemps hors contrôle, plus l’impact de cette espèce étrangère sera important sur la faune native, l’agriculture et la foresterie. »

Certains préconisent, pour essayer de contrôler le phénomène, la mise sur pied de quotas d’écureuils gris répartis entre la France, l’Italie et la Suisse.

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D’autres, dont l’ISE (Initiative européenne pour l’écureuil), qui milite pour la défense identitaire de l’écureuil roux natif, prône des mesures radicales : persuader les organismes écologistes et les gouvernements de l’absolue nécessité d’éradiquer l’écureuil gris en Europe.

Dans les années cinquante, quand les écureuils gris étaient peu nombreux, la situation était gérable. Elle ne l’est plus. Si l’on veut sauver les écureuils roux, européens et indigènes, déjà submergés par les écureuils gris étrangers à notre biotope, il faut prendre des mesures radicales. Pour ne l’avoir pas fait, la Grande-Bretagne n’a plus d’écureuils roux. Ses forêts, ses parcs, ses jardins, sont envahis par les écureuils gris (1).

Officiellement, l’écureuil roux est une espèce protégée. Mais allez expliquer ça à l’écureuil gris… D’autant qu’il y a des cœurs sensibles, peut-être émus par une photo opportune de petits écureuils gris, qui refusent de faire le tri entre les natifs et les envahisseurs : « Je nourris quotidiennement plusieurs écureuils sans distinction de couleurs faute de pouvoir les séparer physiquement. »

Les écureuils gris… Mais je pourrais vous parler des tourterelles turques (originaires d’Indonésie) qui ont tendance à chasser nos tourterelles indigènes. Des moustiques tigres qui ont envahi la totalité du pays et contre lesquels les démoustications, même intensives, sont inopérantes. Des coccinelles asiatiques qui sont en train de régler leur compte à nos coccinelles bêtes à Bon Dieu. Des frelons, eux aussi asiatiques, qui tuent nos abeilles à miel. Etc.

Voilà. C’était mon quart d’heure entomologiste. Une leçon par l’écureuil gris. Naguère accueilli à bras ouverts et qui a fini par chasser de chez lui l’écureuil roux. Ce qui peut donner à réfléchir.

(1) Pour en savoir plus, consulter le site grifouniou.free.fr

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