L’Alsace fête ces jours-ci le 70e anniversaire de sa libération… C’était bien la peine, diront les plus cyniques… Certes, il faut se méfier des raccourcis historiques, mais qu’on le veuille ou non et toutes proportions historiques gardées, dans ce regroupement autoritaire des régions, c‘est bel et bien d’une nouvelle « annexion » non consentie, d’une incorporation forcée de l’Alsace qu’il s’agit. De la négation d’une région que l’Assemblée nationale vient de confirmer, en maintenant son intégration dans la Lorraine-Champagne-Ardenne.
Dans la nuit de mercredi à jeudi, une dizaine d’élus UMP alsaciens ont bien tenté un dernier baroud d’honneur, pour tenter de maintenir la spécificité de l’Alsace, en déployant une grande banderole « Ne tuez pas l’Alsace » dans la salle des Quatre-Colonnes. On les a priés illico de remballer leur dérisoire calicot…
Seul réconfort le même soir, depuis Mulhouse – ça tombait bien –, où il poursuivait son tour de France, Nicolas Sarkozy a promis de « défaire ce qui a été si mal construit », promettant aux Alsaciens qu’ils « seront libres de choisir leur organisation, le moment venu ». Noël approche…
Le débat en tout cas s’anime sur les réseaux sociaux. À travers l’Histoire, m’écrit Delphine Mann sur Facebook, nous étions une région prise, reprise, et ballotée, mais notre existence n’a jamais été niée. « Aujourd’hui, pas d’armes, d’invasions de Suédois, pas de Louis XIV, Bismarck, Wilhelm II ou Hitler. Dans un contexte démocratique, l’Alsace sera niée avec la complicité de la plupart de ses représentants et le silence ambigu des Alsaciens. […] Qu’est-ce qui manque à l’Alsace ? La Corse, la Bretagne, le Centre, le Nord n’ont pas eu à négocier ! […] On a fait plus que les autres pour le pardon, la paix et la réconciliation et on nous efface ! Mais qu’est-ce qu’il faut faire aux Alsaciens pour qu’ils lèvent la tête ? Faut-il naître en Bretagne ou en Corse ? »
Les socialistes jouent avec le feu en voulant abolir l’Alsace. Voudraient-ils renforcer l’autonomisme alsacien qu’ils ne s’y prendraient pas autrement, comme lorsqu’en 1924 le président Édouard Herriot voulut introduire en Alsace-Lorraine, toujours soumise au concordat napoléonien, la loi de 1905 sur la séparation des Églises et de l’État. L’opposition alsacienne fut considérable et le gouvernement dut renoncer à ce projet : ira-t-il jusqu’au bout, cette fois ? L’ogre de Nancy va-t-il dévorer le Petit Chaperon rouge et blanc alsacien ?