Quelques mesures de jazz, et l’on glisse dans le monde allénien. Puis les deux héros apparaissent, Gatsby et sa petite amie Ashley, étudiants en lettres dans une ville de province. Ils décident, à l’occasion d’une interview qui échoit à Ashley pour la gazette de sa faculté, d’en profiter pour passer enfin le week-end à New York dont ils rêvent depuis longtemps. Gatsby y a toujours vécu, alors qu’Ashley a été Miss Arizona à l’université.
Bien évidemment, rien ne va se passer comme prévu. L’interview du « grand réalisateur » qui ne doit durer qu’une petite heure va déboucher sur des rencontres en cascade pour la jeune journaliste en herbe, parachutée dans un monde où sa fraîcheur, qui confine à la niaiserie, alliée à un physique de blonde américaine typique, fait l’effet d’une petite bombe dans ce milieu de « vedettes » revenues de tout. Durant ce temps, Gatsby arpente la ville sous la pluie, apprécie la mélancolie qu’elle fait naître et retrouve des amis d’autrefois. Deux univers se côtoient, celui des médias et celui des affaires – où évoluent les parents de Gatsby – qui peut lui aussi réserver bien des surprises, comme la révélation de la mère de Gatsby à son fils (un peu trop appuyée, mais au diable la vraisemblance).
Tous les ingrédients que l’on goûte chez Woody Allen – quand on les goûte – y sont : personnages toujours un peu en recul vis-à-vis d’eux-mêmes et vaguement dépressifs, allusions à de vieux films, aux histoires juives, noms d’auteurs jetés dans la conversation – Denis de Rougemont, Ortega y Gasset – dialogues pétillants, musique fort bien choisie… tout cela pour illustrer le thème du rat des villes et du rat des champs : c’est sans doute finalement, plus que son ignorance crasse de la littérature, la remarque d’Ashley insensible au charme de la brume sur la ville qui fait prendre à Gatsby la décision finale. Un jour de pluie à New York, ou la comédie légère d’un Musset new yorkais. •
Anne Le Pape- Présent