Si beaucoup pensent qu’il a été dessiné par Michel-Ange, l’uniforme de la Garde suisse est en réalité en service seulement depuis 1914.
Au Vatican, la tendance est à la simplification. Voici quelques décennies que l’usage de la cappa magna des évêques et de la tiare papale a disparu. Seul le protocole en vigueur au sein de la Garde suisse pontificale semble perdurer : nombre de touristes photographient les pittoresques soldats en poste avec leur hallebarde et leur pantalon bouffant à rayures. Si la Garde suisse est née au tout début du XVIe siècle, l’uniforme actuel des soldats du pape ne date en fait que de 1914 et, contrairement aux idées reçues, n’a pas été dessiné par Michel-Ange mais a été inspiré par Raphaël.
Créé par Jules II, appelé le « pape de fer » et instigateur de la construction de la basilique Saint-Pierre, la Garde suisse démarre avec 150 hommes. Au cours des siècles, ce corps d’élite suit les évolutions militaires avant d’être réformée par Jules Repond au début du XXe siècle. Celui-ci impose une discipline de fer et renvoie une grande partie de la garde, car de nationalité italienne. Fait unique dans l’histoire, la garde se met alors en grève et en profite même pour demander l’autorisation de fréquenter les bars de la rive droite du Tibre. Cette mutinerie conduit à son désarmement temporaire par le pape saint Pie X.
Inspiré de la Messe de Bolsena de Raphaël
En retour, le pontife italien soutient le projet de remettre à l’honneur l’uniforme de gala d’origine. En 1914, Jules Repond s’inspire alors de représentations historiques, comme des figures peintes 400 ans plus tôt par Raphaël sur la fresque de la Messe de Bolsena dans le palais du Vatican. Et ce même si les cinq hommes qui ont été pris pour des Suisses sont en réalité les porteurs de la chaise du pape. La confusion viendrait du fait qu’ils étaient armés…
Ainsi redessiné, l’uniforme à la mode du cinquecento n’a plus varié depuis 1914. Seule autre réforme du colonel Repond, le chapeau est remplacé par un béret et un casque en aluminium aux bords relevés et frappé de l’emblème de Jules II : appelé le morion, il est orné de plumes, dont l’espèce et la teinte varient selon le grade.
Lors de son intégration, chaque soldat, nécessairement catholique, célibataire et âgé de 19 à 30 ans, reçoit trois uniformes cousus sur mesure : un d’été, un d’hiver et un d’exercice. Ce dernier, discret et entièrement bleu foncé, est porté lors de l’instruction, au service de nuit et à la porte Sainte-Anne, qui est l’entrée la plus utilisée de la Cité du Vatican.
Ceux d’été et d’hiver ne se distinguent que par l’épaisseur du tissu tricolore et se déclinent avec des accessoires (morion blanc ou noir, cuirasse, gants blancs, gorgerette, guêtres, manteau…). Un tailleur, de nationalité italienne, est chargé au sein de la Garde suisse de réaliser les uniformes.
Signe enfin de son importance : à titre de sanction, le garde qui enfreint le règlement doit détruire au hachoir l’uniforme des anciennes recrues, ce qui permet aussi d’éviter toute utilisation frauduleuse. Un garde suisse peut conserver son uniforme s’il a servi au moins cinq ans et même le porter dans la Confédération helvétique sous certaines conditions. Il est même possible d’être enterré avec.