Par Alain Sanders
La Division aux Fourragères rouges, c’est le surnom qui fut donné à la 1re Division marocaine pendant la Grande Guerre. Elle se composait d’un régiment de Marche de la légion, du 8e de Marche de Zouaves, du 7e de Marche des Tirailleurs. Trois régiments d’attaque qui réunissent 22 citations et portent tous la fourragère aux couleurs de la Légion d’honneur.
En outre, le régiment de Marche de la Légion, après avoir été le premier à porter la fourragère aux couleurs de la Médaille militaire, puis de la Légion d’honneur, est également le premier à recevoir la double fourragère aux couleurs de la Légion d’honneur et de la Croix de Guerre.
En 1914, les troupes du Maroc se disputèrent l’honneur d’aller combattre contre l’Allemagne. Quinze bataillons furent choisis : tirailleurs, coloniaux, bataillons de zouaves. C’est ainsi que fut constituée, sous les ordres du général Humbert, la 1re Division marocaine. Avec une fière devise : « Sans peur et sans pitié ».
Débarquée le 18 août près de Mézières, la Division marocaine reçoit le baptême du feu le 28. Zouaves et tirailleurs, en culotte blanche, ceinture bleue ou rouge, chéchia écarlate, bousculent l’ennemi. Le 30 août, les coloniaux permettent à la 4e Armée le passage de l’Aisne et chargent dans Bertoncourt en flammes. Et puis vint l’ordre du maréchal Joffre : « L’heure n’est plus de regarder en arrière. » Message reçu. Le maréchal Foch dira : « La Division marocaine occupe Mondement, le château et les bois. Il faut qu’elle y tienne à tout prix ; la bataille va pivoter autour de cet axe. La fortune a voulu que la Division marocaine fût là. »
Les coloniaux quitteront la Division pour former le RICM. Le reste appartient à l’histoire. Avec, le 9 mai 1915, l’attaque de la falaise de Vimy et la percée réalisée sous les ordres du général Pétain qui commande le 33e corps, auquel est rattachée la Division marocaine.
Le 23 septembre, sous les ordres du général Codet, la Division marocaine enlève le bois Sabot, s’installe sur la butte de Souain, enlève à l’ennemi quatre kilomètres de terrain, fait des milliers de prisonniers. On la reverra sur la Somme où elle charge sur le plateau d’Assevillers, enlevant Belloy le 4 juillet. Elle redescend dans l’Oise et lance ses chasseurs d’Afrique sur Ham et Nesse. Le 17 avril, elle enlève le Mont-Sans-Nom, Aubérive, pousse jusqu’à Vaudesincourt (plus de mille prisonniers), tient le secteur de Berry-au-Bac.
Reste Verdun. Le 20 août, la Division marocaine occupe Cimières et le bois de Caurettes, le bois de Lumières, le col des Forges, le bois des Corbeaux, la côte de l’Oie, Règneville (22 000 prisonniers, 41 canons saisis). Le 27 septembre, Pétain décore de la Légion d’honneur le drapeau de la Légion et accroche de nouvelles palmes aux drapeaux et fanions de toutes les unités de la Division marocaine. Mot d’ordre : « Frappez ! Lancez vos meilleurs bataillons ! Labourez de vos obus notre sol avec nos chairs ! Ici tient la Division marocaine, on ne passe pas ! » Et l’ennemi ne passe pas. Ni à Villers-Bretonneux, ni à Hangard, ni à Soissons, ni à Ambleny. Non seulement l’ennemi ne passe pas, mais il recule.
Le 18 juillet, au sud de Soisson, encadrée de deux divisions américaines, la Division marocaine atteint la route de Château-Thierry (15 000 prisonniers, 50 canons). Du 2 au 15 septembre, elle repousse les Allemands de Terny-Sorny, Sorny et Neuville-sur-Margival. Le 14 septembre, la position Hindenburg est enlevée. Du 20 avril au 15 septembre, la Division a perdu 300 officiers et 14 000 hommes.
Il n’y a pas un coin du front de France où la Division marocaine n’ait déployé ses drapeaux, pas une offensive où elle n’a pris sa part de sacrifices. Ayant été à la peine, elle sera à l’honneur : elle traversera la Lorraine sous les acclamations et franchira la frontière, entrera dans la Palatinat pour monter sur le Rhin une garde vigilante. La liste de ses citations ne tiendrait pas dans ce seul journal.
Nous n’en donnerons qu’une (Ordre général de la Xe Armée, n° 343, du 13 octobre 1918), celle du groupe de brancardiers de la 1re DM : « Groupe de brancardiers merveilleux d’entrain, de courage et de dévouement. A secouru et évacué les blessés dans tous les grands combats où sa division a été engagée depuis le début de la campagne. Pendant les derniers combats, sous les commandements successifs des médecins-majors Beaufort et Dupont, a évacué les blessés avec une rapidité remarquable, malgré les difficultés du terrain, en rase campagne, sans aucune protection, malgré la violence des bombardements. »