Nantes. La municipalité veut féminiser les noms des rues!

Jamais à court d’idées en matière sociétale, la municipalité nantaise (PS) a lancé récemment une grande enquête auprès des internautes pour attribuer aux rues de la cité des ducs des noms de femmes. Si le choix des personnalités retenues semble à première vue assez éclectique, on s’aperçoit vite que féministes et femmes de gauche ont la part belle. Inventaire.

« Davantage de noms féminins, ça permet de donner plus de visibilité aux femmes et donc d’aller vers davantage d’égalité, au cœur de notre projet », affirme Aïcha Bassal, adjointe au maire en charge de « la vie associative, l’égalité et la lutte contre les discriminations ». L’occasion, selon la Ville, de « mettre en lumière des femmes disparues qui dans l’histoire locale et nationale, récente et plus ancienne, ont marqué leur époque alors que l’histoire les a éludées. »Au final, 38 noms ont été sélectionnés, répartis en six catégories : artistes, militantes, résistantes, scientifiques, sportives et « inclassables ».

Certains des noms proposés concernent des personnalités de la région – comme les femmes de lettres nantaises Mélanie Waldor et Madame de Stolz (à l’état civil Fanny de Bégon), la peintre Anne Mandeville, Clémence Lefeuvre – qui créa la célèbre recette du beurre blanc – ou la poétesse bretonne Philomène Cadoret.

De la région encore les résistantes Raymonde Guerif et Renée Baudic ou l’héroïne de la Grande guerre Gabrielle Le Pan de Ligny. Après avoir accueilli des blessés de guerre dans sa propriété familiale, cette dernière s’engagera en 1916 comme infirmière militaire volontaire. Appelée sur le front elle sera grièvement blessée et décédera le 5 novembre 1917.

Le choix d’Isabelle Wilhelmine Marie Eberhardt (1877-1904) laisse par contre perplexe. Le fait que cette écrivaine suisse, de parents d’origine russe, devenue française par mariage, se soit convertie à l’islam explique-t-il ce choix ? Dans le même registre, on relèvera le nom d’ Assia Djebar, une femme de lettre algérienne d’expression française et celui de la chanteuse, musicienne et actrice égyptienne, Oum Kalthoum, dont les liens avec Nantes, la Bretagne et la France restent à démontrer. Sauf à vouloir satisfaire la nombreuse communauté arabo-musulmane arrivée dans la région depuis quelques décennies, ce qui est probablement le but, « diversité » oblige.

La politique n’est bien sûr jamais très loin. Dans la catégorie « militantes » on trouve par exemple Suzanne Barbanchon, militante socialiste et au Droit au logement, mais aussi Danielle Mitterrand, la femme de l’ancien président de la République, dont la proximité avec le PS est évidente, mais les liens avec Nantes plus incertains. Sans doute histoire de faire plaisir à l’extrême gauche, la révolutionnaire marxiste allemande Rosa Luxembourg (1871-1919) figure aussi au tableau.

Sans surprise, des noms de militantes féministes sont proposés : la Nantaise Maryse Guerlais, du centre Simone de Beauvoir – « Parmi tous les scandales que sont les différents modes d’oppression, de violences, de ségrégation, de discrimination dont l’humanité est porteuse, s’est imposé à moi celui de l’inégalité entre les femmes et les hommes. » – et Simone Iff, une militante du droit à l’avortement, instigatrice du manifeste des 343 – qu’elle ne signera pas – et première présidente du Mouvement français pour le planning familial.

Plus original, le choix de l’Américaine Lucy Stone (1818-1893), qui a le mérite (?) d’avoir été à la fois féministe, abolitionniste et militante du mouvement pour la tempérance visant à interdire la consommation d’alcool… mais dont les liens avec l’histoire locale où nationale restent à démontrer.

Parmi les sportives retenues, Aimée-Marie Éléonore Lallement, (1898-1988) fut une championne du monde dans les épreuves du 110 m et du lancer du javelot, mais aussi une militante associative, socialiste et féministe. Jacqueline Auriol (1917-2000) fut la première femme pilote d’essai en France et accessoirement la belle-fille du socialiste Vincent Auriol, président de la République sous la IVème.

Le choix de l’artiste peintre mexicaine Frida Kahlo, est plus intéressant. Si la qualité de son œuvre est indiscutable, son engagement politique – elle était communiste – explique sans doute sa sélection dans la catégorie « artistes ». Maîtresse de Léon Trotski – réfugié au Mexique, il sera assassiné en 1939 sur ordre de Staline – Frida Kahlo n’avait par ailleurs guère de sympathie pour les intellectuels français. Venue à Paris en 1939 pour une exposition, elle trouve que celle-ci « est envahie par cette bande de fils de putes lunatiques que sont les surréalistes ». Les intellectuels parisiens sont à ses yeux des « pourris » qu’elle ne peur supporter. Un assez bon choix, finalement…

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