Une centaine d’intellectuels signent, le 20 mars, dans Le Figaro, une tribune « contre le séparatisme islamiste ». Nul doute qu’il s’agisse d’un pare-feu face à l’attente des annonces d’Emmanuel Macron concernant un coup de pouce donné à l’islam « de » France pour le structurer, ce qui donnerait une plus grande exposition encore à cet islam radical qui a déjà gagné la bataille interne à cette religion sur le voile et le halal.
Par sa « structuration », Emmanuel Macron a l’ambition outrancière et déraisonnable de vouloir transformer l’islam comme on transformerait une entreprise ou un pays, alors que c’est la laïcité qui a besoin d’être affirmée, précisée, et l’islam radical combattu. Le plus grand risque est le refus des musulmans eux-mêmes d’être « transformés ».
L’ambition est outrancière car envisager la création d’une « faculté de théologie musulmane », comme le préconise Jean-Pierre Chevènement, qui préside la Fondation des œuvres de l’islam de France, va au-delà d’une simple structuration. C’est vouloir être à la tête du renouveau théologique de l’islam, Même si l’islam a évolué au cours des siècles, la charia reste le fondement de la loi islamique et la Oumma la nation des musulmans, la matrie, en opposition avec la patrie. Tout contre-discours théologique se heurtera toujours à cette difficulté majeure.
Selon un sondage du Figaro de 2016, un tiers des musulmans français estimaient que la charia était plus importante que la loi de la République.
L’ambition est aussi déraisonnable car il n’y a pas un mais des islams en France, tellement les courants sont divers et opposés. Le plus bel exemple en est la création de trois conseils théologiques différents en 2016, un quatrième, régional, venant d’être créé à Lyon en 2018. Vouloir désigner un « grand imam de France », autre structuration envisagée, est une hérésie comme l’est aussi une instance représentative. Cette démarche transformatrice d’Emmanuel Macron n’est d’ailleurs pas accueillie à bras ouverts par le CFCM, dont l’actuel président d’origine turque Ahmet Ogras a déclaré que « le culte musulman est une religion, donc elle gère elle-même sa maison ». Les musulmans salafistes, wahhabites immigrés en France et les Frères musulmans de l’UOIF qui craignent plutôt une déstructuration de la situation actuelle seront les principaux opposants à cette réforme.
Alors, que faire ? La vraie réforme à mener est celle de la défense de la laïcité, le souci doit être de préserver la cohésion nationale et la possibilité d’avoir des consciences libres. La tribune du Figarorejoint l’état des lieux décrit dans le rapport du préfet Clavreul, demandé par le gouvernement et paru en février, qui dresse un constat alarmant de la laïcité en France et du vivre en commun collectif.
Or, justement, ce que veut l’islam politique des Frères musulmans et des salafistes, c’est nous obliger à nous soumettre à leur vision de l’islam.
Le Parlement devrait proposer une grande loi sur la laïcité imposant un code de conduite au sein de la République, une loi définissant les limites dans lesquelles aucune religion ne doit envahir l’espace public, collectif et politique. Le cas du port du voile islamique est emblématique. En 2017, l’université d’al-Azhar a statué sur le fait que ce n’était pas une obligation islamique. Continuer à le porter ou se mettre à le porter est bien une affirmation politique identitaire et communautarisme. S’il ne trouble pas la laïcité au sens strict, le voile islamique trouble le vivre en commun collectif et correspond, en cela, à un trouble à l’ordre public au sens de l’article 1 de la loi de 1905.
C’est d’autant plus vrai que le Guide interministériel de prévention de la radicalisation de 2016 considère qu’un nouveau comportement dans le domaine vestimentaire est considéré comme un signe de début de radicalisation. Alors, qu’attend-on avant qu’il ne soit trop tard ?
Philippe Franceschi – Boulevard Voltaire