Salt Lake City, la ville du Lac salé, a une particularité : c’est la ville des Mormons, cette étrange secte protestante qui pratique tout à la fois l’austérité et la polygamie.
Nous sommes en 1858 et l’armée américaine fait son entrée dans la ville après un conflit avec les dits Mormons.
La jeune et jolie veuve Annabel Lee accueille avec joie ces fringants officiers. Elle s’ennuie un peu, est riche et aime qu’on lui fasse la cour.
Mais elle a un mentor, le Père d’Exilès, jésuite français qui veille sur sa vertu et la presse de quitter la ville. Lui-même doit prochainement partir évangéliser des tribus indiennes et ne veut pas la laisser derrière elle.
Ils sont très amis, un peu trop d’ailleurs, mais l’auteur nous épargne toute vulgarité sur le sujet.
Annabel doit loger chez elle un beau lieutenant méthodiste. Le jésuite sent le danger et introduit un pasteur, méthodiste également, afin de contrarier une idylle qu’il craint pour sa protégée. Mais, par son zèle intempestif, il a déclenché un processus bien pire.
Ce pasteur tombe amoureux d’une jeune mormon, Sarah : « Tous ses froissements d’étudiant pauvre, ses amertumes religieuses, ses doutes, ses haines mal endiguées, ses déceptions, ses sombres ambitions enfin, il les sentait s’exaspérer aussi sous ce mince front de vierge, poli comme du buis, sous ces bandeaux lisses, sous ces paupières baissées, sous cet étroit corsage où devait à coups précipités battre un frénétique coeur. »
Sarah hait Annabel et va se servir du pasteur pour tenter d’assouvir une vengeance ruminée depuis longtemps.
L’intensité du roman croît au fil des pages et la tragédie se noue inexorablement.
Pierre Benoit fut un auteur à succès dans l’entre-deux guerres. Grand voyageur, il aimait situer ses romans dans des lieux exotiques avec de belles aventurières et des intrigues bien orchestrées.
De la littérature facile mais bien faite et bien écrite. Ce n’est plus très fréquent.
