La pyramide du Louvre, version saoudienne…

Depuis qu’à la Révolution l’égyptologie de bazar et la franc-maçonnerie du même métal ont pénétré notre société française, il n’a pas manqué d’illustres personnages titillés par « le désir de pyramide ». Pyramides éphémères aux Tuileries, projet de gigantesque monument funéraire sur les Champs-Élysées (Giraud, en 1801), c’est finalement à François Mitterrand que nous devons LA pyramide, celle du Louvre signée de l’architecte Ieoh Ming Pei. Complétée, ce que l’on sait moins, par un ravissant petit mastaba caché sur le Champ-de-Mars, auquel le vieux Président rendait régulièrement visite dans ses derniers jours.

La Pyramide du Louvre est le seul des « Grands Travaux » qui ait échappé au concours. Décidé par le Président (on dit d’ailleurs que ce fut, en réalité, Anne Pingeot) et placé sous le seul contrôle de son bon vouloir, Mitterrand en surveilla personnellement toutes les phases.

De même qu’on nous avait vendu, pour la Bastille, l’argument de « l’Opéra populaire », on nous assura qu’il fallait au Louvre une pyramide pour accueillir les visiteurs. Pei, quant à lui, n’était pas chaud. En effet, si l’on s’en réfère à Émile Biasini (l’homme chargé de donner corps aux rêves du président-bâtisseur), « Pei a longtemps hésité sur la nature et le dessin de cette entrée, car son respect pour le palais des rois de France et les directives qu’il avait reçues lui commandaient de ne rien bâtir en surface ».

Qu’à cela ne tienne : la France eut sa pyramide (largement copiée en province). Et commença alors le calvaire des visiteurs dont la queue serpente, été comme hiver, entre des barrières juste propres à défigurer le site : certains jours, il faut compter trois ou quatre heures d’attente avant de pouvoir pénétrer dans une salle du musée.

Vingt-cinq ans plus tard, donc, ayant « chaussé les lunettes du visiteur » (sic), Jean-Luc Martinez, l’actuel président du Louvre, « a vu la foule, les files d’attente interminables, les caisses difficiles d’accès, les sanitaires encombrés sans parler de la signalétique à la fois géante et peu lisible », comme le rapporte Le Figaro. Diantre ! Un quart de siècle pour faire cette découverte ! À croire que ce monsieur ne connaît son musée que les soirs de vernissage, entre champagne, ministres et VIP.

Bref, on va tout revoir, tout repenser et tout refaire. Vient ainsi de démarrer un grand chantier prévu pour durer trois ans. Coût des travaux : 53,5 millions d’euros. Qui seront sans doute dépassés. Et je vous entends d’ici, amis lecteurs : « Mais la France n’a plus de sous ! » Certes. Mais nos amis les émirs en ont. On leur a offert le Louvre Abu Dabi, ils vont nous refaire la Pyramide. Après le PSG, les palaces, les hôtels du Marais, la moitié des beaux quartiers, les boutiques de luxe – on en oublie et on en passe –, on peut bien leur vendre aussi les joyaux de la couronne…

Triste constat : la France d’aujourd’hui, celle qui entend punir les clients des prostituées, n’est plus qu’une fille facile qui se vend au plus offrant.

Lu sur Boulevard Voltaire

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