« Aucun pays n’est épargné », c’est ainsi que l’on peut résumer la situation mondiale sur la pédocriminalité. Après deux années de recherche, l’ECPAT (une ONG militant pour la fin de la prostitution infantile dans le monde) a publié jeudi dernier un rapport de plus de 150 pages concluant que « les enfants sont plus que jamais victimes d’exploitations sexuelles ». En 20 ans, non seulement le tourisme pédosexuel a énormément augmenté, mais le profil des criminels a également changé.
Fini le typique homme blanc occidental, d’âge moyen, qui pour assouvir son « désir » est prêt à mettre le prix et des milliers de kilomètres. Comme l’écrivent les auteurs du rapport : « Les délinquants pédosexuels peuvent être étrangers ou locaux, jeunes ou âgés […] Aussi, ils présentent des caractéristiques économiques et sociales très diverses. » Ainsi, on retrouve aussi bien des touristes, des voyageurs d’affaires, des migrants, des étudiants, des travailleurs temporaires, des expatriés et même des bénévoles.
Par ailleurs, et bien que moins commun, mais phénomène en croissance, les femmes ne font pas exception. Le rapport cite la ville de Rostov (en Russie), où des femmes âgées de 30-35 ans, à l’occasion de voyages professionnels, louent les services d’adolescents locaux en échange de « scénarios romantiques ». Cette tendance est également observée en Amérique du Sud et en Afrique.
Le rapport avance deux grandes causes à ces bouleversements :
1) Le développement du tourisme de masse jusque dans des zones isolées,
2) Les nouvelles technologies, ouvrant des voies d’exploitation et renforçant l’anonymat des criminels.
Au final, il s’agit d’un rapport détaillé, bien référencé et proposant des pistes d’action intéressantes.
Cependant, j’ai été beaucoup interpellé que le mot « pédophile » ne soit mentionné sur aucune des 157 pages du rapport. À la place, le terme utilisé est « délinquant préférentiel », qui lui-même est opposé à « délinquant situationnel ». Selon le rapport, ce dernier représente la grande majorité des individus impliqués dans le tourisme pédosexuel, mais ils ne sont pas considérés comme des pédophiles. En effet, ces « délinquants situationnels » sont définis comme « n’ayant peut-être jamais fantasmé à abuser sexuellement d’un enfant, jusqu’à ce qu’ils aient eu l’opportunité de le faire ». Pour résumer, si l’individu est dans une situation de « pas vu pas pris », alors il se peut qu’il ressente une « excitation due à la situation » sans pour autant être qualifié de pédophile.
Depuis 2013, l’Association des psychiatres d’Amérique (APA) a statué, dans la DSM (référentiel des maladies mentales), qu’il était nécessaire de faire une différence entre les pédophiles qui ont un désir sexuel avec des enfants et ceux qui posent des actes sur ces mêmes désirs. Ainsi, la pédophilie n’est plus, de facto, considérée comme un désordre psychiatrique mais comme une paraphilie, soit une fantaisie sexuelle. En conclusion, la déstigmatisation de la pédophilie est en marche.