Dans la lignée de son livre “Les secrets du Vatican”, Bernard Lecomte rouvre seize dossiers emblématiques et souvent mystérieux concernant l’Eglise catholique. L’un d’entre-eux est l’authenticité du tombeau de Saint Pierre à Rome.
Extraits des “Derniers secrets du Vatican”
Rome, 24 décembre 1950. A l’occasion de son « radio-message » de Noël clôturant l’Année sainte 1950, Pie XII révèle au monde l’extraordinaire découverte : – Le tombeau du Prince des Apôtres a été retrouvé !
Le pape, ému, décrit le « sépulcre originairement très modeste, mais sur lequel la vénération des siècles postérieurs a élevé, par une merveilleuse succession de travaux, le plus grand temple de la chrétienté ». Et Pie XII d’annoncer qu’une publication scientifique présentera bientôt cette découverte au grand public. Son titre : Esplorazioni sotto la Confessione di San Pietro in Vaticano eseguite negli anni 1940-1949. Ce document en deux volumes sera – et restera longtemps – une exceptionnelle mine de renseignements pour tous les archéologues et historiens de l’Antiquité.
L’annonce de la découverte, pour extraordinaire qu’elle soit, ne peut cependant cacher une profonde désillusion : le tombeau de Pierre a été retrouvé, certes, mais il est vide. On a bien recueilli quelques débris d’ossements dans la niche du « mur rouge », on les a même photographiés in situ avant de les ranger dans une urne spéciale en 1945, mais rien ne permet d’affirmer qu’ils ont appartenu à saint Pierre. Les auteurs des Esplorazioni sont très discrets sur ce sujet : pas question d’extrapoler ou de fantasmer. Le pape lui-même est très clair : La tombe de saint Pierre a-t-elle été réellement retrouvée ? A cette question la réponse est sans doute oui. Telle est la conclusion à laquelle aboutit la somme de travail et d’études de ces dernières années. Une deuxième question, subordonnée à la première, se rapporte aux reliques de saint Pierre. Celles-ci ont-elles été retrouvées ? A côté de la tombe, on a découvert des restes d’ossements humains. Mais il est impossible de certifier qu’ils appartiennent au corps de l’Apôtre…
Quelques mois plus tard, Pie XII confie au docteur Galeazzi-Lisi, son médecin personnel, le classement et l’étude des os trouvés dans la niche du « mur rouge », avec mission de répondre à quatre questions : 1. Ces ossements appartenaient-ils au genre humain ? 2. Provenaient-ils d’une même personne ? 3. Si oui, pouvait-on en établir le sexe et l’âge du squelette ? 4. Y avait-il, parmi les os, des fragments d’une boîte crânienne ?
Dans ses Mémoires, Riccardo Galeazzi-Lisi explique qu’il a d’abord isolé les éléments non osseux – monnaies, tessons, clous, débris de bois – avant d’étudier les ossements eux-mêmes dans un laboratoire spécialement conçu pour lui à l’intérieur du Vatican : « Je procédai, écrit-il, à toutes sortes d’examens radiographiques, chimiques, microscopiques, en me faisant aider par des spécialistes et des techniciens divers. Sur la photo prise d’un squelette, grandeur réelle, d’un adulte de taille moyenne, on plaça, fixés par des ligatures de fil de laiton très souple, tous les os à disposition, non sans les avoir enduits d’un vernis destiné à éviter leur effritement, voire leur pulvérisation. »
Dans son récit, Galeazzi-Lisi raconte que le squelette était presque complet, à l’exception du crâne. Qu’il était bien du genre humain, d’une taille supérieure à la moyenne, de sexe masculin et d’un âge avancé. Pour lui, pas de doute, il s’agit de l’apôtre Pierre. Mais, curieusement, l’archiatre de Sa Sainteté explique que l’Eglise doit encore « étudier et méditer », qu’elle mettra longtemps avant de rendre publics ses travaux, que lui-même est lié au secret, etc.
En réalité, aucun scientifique n’a jamais avalisé ses conclusions, aussi péremptoires qu’imprécises. Ni ses mystérieuses réserves. Le vrai secret de Galeazzi-Lisi ne serait-il pas qu’il est…ophtalmologiste, et totalement incompétent en anthropologie ? En 1952, plusieurs scientifiques italiens entreprennent une nouvelle série de fouilles à partir des Esplorazioni sotto la Confessione di San Pietro. Notamment les professeurs Adriano Prandi et Domenico Mustilli, ainsi qu’une épigraphiste professeur à l’université de Rome, Margherita Guarducci. Cette spécialiste des graffiti grecs a été frappée par une inscription repérée près d’une niche creusée dans un mur de soutènement édifié perpendiculairement au « trophée », et baptisé « mur g » par les archéologues.
Cette inscription en caractères grecs de 7 millimètres de haut gravés à l’endroit où le « mur rouge » et le « mur g » se touchent ressemble fort à : PETROS ENI. Ce qu’elle traduit par : « Pierre est là-dedans ». Là-dedans, mais où ? Il y a bien ce loculus, cette niche grossière, en bas, dans le « mur g », qui renfermait une sorte de coffre aux parois de marbre, sans couvercle. Mais l’endroit, semble-t-il, est vide depuis très longtemps.
Extraits du livre “Les derniers secrets du Vatican” de Bernard Lecomte aux Editions Perrin