« Le MRJC est totalement étranger à l’anthropologie chrétienne »

A la veille de la Marche pour la Vie, Le Mouvement rural de jeunesse chrétienne (MRJC) s’est déclaré ouvertement pro-avortement dans un communiqué de presse. Malgré un recadrage par la Conférence des évêques de France, le MRJC persiste et signe en organisant un week-end pro-genre début mars. Une position sur laquelle revient Cécile Edel, cofondatrice de la Marche pour la Vie et présidente de l’association Choisir la Vie.

— Après avoir attaqué violemment la Marche pour la Vie, le Mouvement rural de jeunesse chrétienne (MRJC) continue d’enfoncer le clou, en organisant un week-end pro-genre début mars, qu’en pensez-vous ?

— L’organisation de ce week-end pro-genre ne m’étonne absolument pas ! Celui-ci n’est finalement que la suite logique de toutes les actions menées par ce mouvement depuis sa création au début des années 60. Il est d’ailleurs utile, me semble-t-il, de rappeler que le MRJC, très rapidement après sa naissance, fut marqué par une radicalisation politique et une progression constante de l’idéologie marxiste au sein de ses rangs.

Aujourd’hui, les membres du MRJC font des questions « sociétales » leur cheval de bataille en s’affichant sans aucun complexe pro-avortement, pro-mariage pour tous, pro-genre… Rien d’étonnant !

Au regard des actions récemment connues du MRJC, force est de constater combien ses responsables sont, non seulement totalement étrangers à l’anthropologie chrétienne mais surtout que c’est toujours la même ligne politique, idéologique, qui prévaut au sein de ce mouvement, avec le même fond de sac idéologique et le même fonctionnement militant. Le mouvement continue d’adopter une ligne qui vise à fouler les fondements de l’Eglise catholique, tout en étant attentif à bien rester identifié comme mouvement chrétien afin d’obtenir la caution de celle-ci, gagner la confiance de certains et pouvoir continuer à récupérer des fonds de l’Eglise. C’est un joli un travail d’entrisme !

— Pensez-vous que ce week-end soit une provocation supplémentaire – après le premier communiqué contre la Marche pour la Vie – du MRJC ?

— Selon Mélanie Morichon, animatrice permanente de la section Ardèche, interrogée par le journal La Croix, le week end et son thème auraient été prévus depuis l’assemblée générale régionale Auvergne-Rhône-Alpes de septembre, soit sans aucun lien, donc, avec leur communiqué sur l’avortement. Nous ne pouvons de ce fait y voir une provocation supplémentaire. Toutefois, nous le prenons comme tel. Ce dernier constitue surtout une preuve supplémentaire (s’il en fallait une) que ce mouvement ne peut être considéré comme un mouvement d’Eglise.

Vous remarquerez, d’ailleurs, que les responsables n’ont en aucun cas annulé ce week-end, malgré la récente polémique autour de leur mouvement et de leur financement.

Le maintien de ce week-end ouvertement pro-genre et accompagné, de plus, d’un tract clairement indécent, tend à prouver que le MRJC est totalement indifférent à ce que les évêques peuvent penser. Ses dirigeants doivent se sentir bien protégés, intouchables et surtout extrêmement puissants pour agir de la sorte.

— Qu’est ce qui « pêche » dans le raisonnement du MRJC ? Quelle vraie réponse leur apporter ?

— Le MRJC n’est absolument pas cohérent. D’un côté, ses responsables soutiennent des positions qui se détachent, voire sont à l’opposé de l’enseignement multiséculaire de l’Eglise du Christ mais, d’un autre côté, ils tiennent à rester coûte que coûte dans le giron de celle-ci.

Nous ne pouvons que demander à ses responsables d’avoir le courage d’assumer leurs choix idéologiques et de rechercher notamment un autre mode de financement, compatible avec leurs positions. Leur posture est trop facile sinon !

— Quelle réaction attendez-vous aujourd’hui de la part des évêques ?

— A l’heure où les repères sont dilués et les convictions endormies, le manque de fermeté de nos pasteurs me semble préjudiciable. Il confirme, d’une part, les plus indécis dans leur syncrétisme moral et, d’autre part, il blesse la confiance que de nombreux fidèles placent en eux, pour coordonner une action en accord avec le message de l’Evangile.

La CEF est restée, pour l’instant, au stade de l’affirmation des principes, mais pèche par manque de fermeté, que son statut de « mère » lui impose.

L’honnêteté intellectuelle et financière impose, en effet, que chacun prenne ses responsabilités. La CEF ne peut se contenter sur ce point d’une rencontre et d’un communiqué… Elle doit aux fidèles et à ses donateurs davantage de clarté et doit sanctionner fermement le MRJC. Surtout, elle ne peut mettre volontairement ses fidèles en porte à faux avec leur conscience.

Il faut bien comprendre, en effet, qu’au débat sur le fond s’ajoute le malaise lié à la question du financement de ce mouvement par l’Eglise. Loin d’être le simple versant matériel et secondaire de cet épineux dossier, cette subvention met en cause le respect de la conscience des contributeurs.

Les 574 000 euros de subvention annuelle versés par l’épiscopat français font inévitablement des fidèles donateurs à l’Eglise les complices d’une idéologie qu’ils sont censés contrer et que nous combattons depuis plusieurs décennies. Nous ne pouvons l’accepter.

Ce que nous attendons de nos évêques n’est donc ni plus ni moins qu’une réaction de grande fermeté, comme a pu l’être celle de Mgr Ginoux, évêque de Montauban, qui a eu, selon moi, la réponse la plus juste au communiqué pro-avortement du MRJC et que je remercie vivement. Ce dernier a rappelé, non seulement que le communiqué de ce mouvement contredisait le magistère de l’Eglise mais il a ajouté : « Si j’en viens maintenant à la lettre C de votre mouvement je crois qu’elle peut disparaître. Un mouvement qui se dit chrétien, reçoit des subventions de l’Eglise catholique et prône l’avortement est en totale contradiction avec l’enseignement de l’Eglise. » Par conséquent, l’évêque ne reconnaît plus le MRJC comme mouvement de l’Eglise catholique et lui retire toute subvention.

Mgr Ginoux conclut d’ailleurs par cet appel : « Je vous invite à réfléchir sur ces questions, à ne pas suivre la pensée dominante qui, sous prétexte de liberté, abîme l’homme en le déshumanisant. Approfondissez plutôt la pensée chrétienne, prenez de la peine au lieu de vous fier à des slogans, au prêt-à-penser idéologique. Alors, peut-être, vous comprendrez ce que j’ai voulu vous dire. »

A l’instar de Mgr Ginoux, légitimement, nous pourrions attendre de la CEF une ferme « condamnation » du mouvement MRJC, avec le retrait de la référence à ce mouvement sur le site de celle-ci, ainsi que, bien entendu, l’arrêt des subventions.

Propos recueillis par Anne Isabeth pour Présent

Related Articles