Viet Nam histoire d’une nation

Au moins depuis 1945, on ne compte plus le nombre de fois où le Viêt Nam a fait la « une » de l’actualité . Mais comment comprendre l’actualité sans se référer à l’histoire ? Grâce à Nguyen Thi Viet, formée à la discipline historique à l’université Paris VII, nous bénéficions d’une remarquable histoire du Viêt Nam, à la fois complète, référencée et claire.

Tout commence avec le royaume du Van Lang (2897-257 av. J.-C.) – terme qui désigne moins le nom d’un pays que celui d’une population ethnique différenciée qui tient à se distinguer des Chinois. La Chine, justement. : elle occupa le Viêt Nam pendant près de mille ans (111 av. J.-C.- 939) ! Ce qui n’empêcha pas le peuple viêt de conserver intacte la langue et la culture qui lui sont propres. Par la même occasion, nous voyons sous un autre jour les tensions qui existent aujourd’hui entre les deux pays qui, pourtant, se réclament du communisme : la guerre de frontière sino-viêt date de…1979, et c’est en 1988 que la Chine s’empare de l’archipel des Spratleys par la force.

La figure de Diem

Dans cette Histoire du Viêt Nam, notre attention se porte naturellement sur ses rapports avec la France. Ils sont particulièrement anciens, puisque le Traité de Versailles entre Louis XVI et le roi de Cochinchine Nguyen Anh remonte à 1787. Traité, hélas ! non appliqué car la France, à la veille de la Révolution, était en pleine crise financière.

L’époque contemporaine n’est pas la moins intéressante. Est bien mis en évidence que la prise du pouvoir par Hô Chi Minh en 1945 se fit avec l’aide de l’Office of Strategic Services (OSS). Comme le relève l’auteur, « l’OSS joue un grand rôle dans la formation, l’équipement militaire et la propagande en faveur du Viêt Minh », et ceci parce que le président Roosevelt avait décidé de ne pas rendre l’Indochine à la France. Quant au chapitre « Les Etats-Unis et la guerre du Viêt Nam (1955-1975) », il met en perspective nombre d’informations peu connues.

Alors que les Français s’en vont, les Américains apportent leur assistance au président Diem dans le cadre de leur stratégie anticommuniste en Asie du Sud-Est. Diem était un catholique épris de tradition ; il disait du reste s’inspirer de la pensée de Louis de Bonald. Patriote, il n’acceptait pas une ingérence américaine trop poussée dans la politique de son pays : « Si vous faites venir l’armée américaine au Viêt Nam, comment vais-je l’expliquer à mon peuple ? L’image du corps expéditionnaire français est encore dans tous les esprits. La présence de n’importe quelle armée étrangère au Viêt Nam n’apportera que des inconvénients et fera perdre sa justification à notre lutte. » En novembre 1963, avec l’appui de Washington, Diem est renversé par un complot de militaires et assassiné sur le parvis de l’église Saint-François-Xavier de Cholon au sortir de la messe.

Bien des années plus tard, William Colby, ancien directeur de la CIA, dans son livre Viet Nam, histoire secrète d’une victoire perdue (Perrin, 1992), confiera que ce fut une erreur capitale d’avoir œuvré pour la liquidation de Ngo Dinh Diem. En effet, Diem était le seul à avoir fait preuve d’efficacité à l’encontre du Viêt Cong, notamment avec la réalisation des « hameaux stratégiques » ; dur, mais personnellement intègre, il avait en tout cas une vision cohérente de la lutte anticommuniste. Aussi ce n’est pas sans un serrement au cœur qu’on lit les pages consacrées aux derniers jours de la République du Sud Viêt Nam. Lorsque, le 28 avril 1975, le général Duong Van Minh ordonne à la radio la reddition « sans condition » et l’arrêt total des combats pour l’armée nationale du Sud, sept de ses hauts commandants ainsi que des centaines d’officiers et de soldats sud-vietnamiens choisissent de se donner la mort.

  • Nguyen Thi Viet, Viet Nam histoire d’une nation, éditions du Jubilé, 640 pages, 25 euros.

Philippe Vilgier – Présent

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