Il y avait un âne, un vrai (ils sont nombreux, sur l’île de Ré), un bœuf, plutôt rare ici, une Vierge et un saint Joseph en mannequins regardant avec tendresse un joli baigneur figurant le petit Jésus, tendant les bras sur un berceau de paille. Avec un ou deux moutons qui dormaient dans l’enclos posé au pied de l’église de Saint-Martin-de-Ré, la capitale.
C’était mignon. Nombreux étaient les enfants attirés par cette crèche vivante qui rappelait à leurs parents la vraie raison de Noël. Le pourquoi de Noël, expliquant aux petits que si le 25 décembre, au pied d’un sapin, ils découvraient un monceau de cadeaux superbement empaquetés, c’était parce qu’il y a plus de 2.000 ans, un enfant, fils de Dieu, était né d’une vierge nommée Marie et d’un papa connu sous le nom de Joseph de Nazareth…
Mais voilà, j’ai utilisé l’imparfait à bon escient, car la crèche vivante de Saint-Martin a disparu du parvis de l’église. Le clergé n’a pas bronché : on était sur le domaine public, alors vous comprenez…
Les dix églises de Ré présentent chacune leur propre création. Superbe, celle de La Couarde, faite de coquillages, celle d’Ars a remplacé Bethléem par un port et ses marins. Mais l’esprit de Noël, celui que la France a célébré pendant des générations, notamment sur cette terre huguenote, a disparu. Si vous n’entrez pas dans une église, comment savoir la raison de ces « Joyeuses Fêtes », car les villes ne vous souhaitent plus un « Joyeux Noël » mais de Joyeuses Fêtes, quand ce n’est pas, comme vient de le faire la déroutante FCPE, une très gauchisante Fédération de parents d’élèves, de souhaiter par tweet interposé de « Joyeuses Fêtes Laïques ». Non, vous ne rêvez pas ! La laïcité devient bel et bien une nouvelle religion qui s’impose insidieusement à nous.
Et que dire de la messe de minuit qui n’a plus lieu à minuit. C’est le cas sur l’île de Ré où les curés ont choisi des heures plus conviviales, genre 17 heures pour les enfants, et 19 heures ou 21 heures pour leurs parents afin de leur permettre d’ouvrir le champagne à minuit…
Mais à Ré, ne nous plaignons pas, puisque les marchés de Noël ne sont pas devenus, comme à Poitiers ou à Nantes, les marchés de Lëon.
Pauvre catholicité bien mise à mal dans les plus lointaines de nos campagnes. Fini le petit Jésus que nous transformons en dernier gadget à la mode réclamé par nos bambins. Comment pourraient-ils comprendre le sens sacré de cette fête dont j’entends avec ravissement sur les radios américaines (je vous recommande martiniinthemorning.com) que c’est la plus belle journée de l’année, et d’expliquer sans honte que « a savior is born ». Je me souviens que nos grandes ondes françaises diffusaient, dès le 15 décembre, de nombreux chants de Noël, religieux ou non. Aujourd’hui, je suis devenu sourd sans doute, car en dehors de quelques publicités reprenant nos crooners susurrant un chant de Noël, ces chants restent dans les tiroirs de leurs archives musicales.
Tout cela au nom de la nouvelle laïcité qui a empiré sous Hollande et qui, sans doute pour protéger une religion islamique qui n’en demande pas tant, sape la catholicité de notre vieux pays. Alors, oui, à Noël, je serai un peu triste devant ma petite crèche composée de santons chers à nos traditions.
Floris de Bonneville – Boulevard Voltaire