Cyrano chez les Basques: la villa Arnaga (Vidéo)

https://www.youtube.com/watch?v=sFAhjQ2ySA8

 

« Ah ! Non ! C’est un peu court, jeune homme ! On pouvait dire… oh ! Dieu ! … bien des choses en somme… En variant le ton. » Qui n’a pas appris la tirade du nez (acte I, scène IV) quand il était petit ? Qui n’a pas frémi devant cet Hercule combattant le malandrin à Paris ou l’Espagnol à Arras ? Qui n’a pas été ému par cet homme si laid mais si talentueux qui aime Roxane, mais n’est pas aimé en retour ? Hé oui, Cyrano de Bergerac (1897) est connu de tous.

Et pourtant, la vie de son auteur, Edmond Rostand (1868-1918) l’est beaucoup moins. Saviez-vous par exemple que l’auteur de l’Aiglon a toujours douté de lui ? Eternel anxieux et dépressif, il l’est indéniablement. A tel point qu’avant la première de Cyrano, l’auteur s’excusa par avance auprès des comédiens, en particulier Constant Coquelin, pour le futur fiasco. La peur de l’échec l’animera toujours, malgré L’Aiglon et Sarah Bernhardt, malgré les honneurs, malgré l’Académie (au 31e fauteuil, qui sera, entre autres, celui de Cocteau et Dutourd), malgré l’argent…

La villa Arnaga

Il était aussi souffreteux, depuis l’enfance. Après une pleurésie mal soignée, il part se reposer à Cambo-les-Bains, dans le Labourd basque, haut lieu du thermalisme de la région. Visiblement, l’endroit l’enchante et, entre 1903 et 1906, il y fait construire une maison : la villa Arnaga. Elle lui appartiendra jusqu’à sa mort en 1918.

A première vue, c’est une grande et jolie maison labourdine typique : en pierre chaulée, portant une structure en bois peinte en rouge brun, un toit peu incliné à deux versants asymétriques. C’est beau et élégant. Mais l’écrivain souhaite du luxe et du confort. L’architecte Albert Tournaire aura une idée de génie : partir du modèle traditionnel et le faire évoluer en un nouveau style appelé néo-basque, style qui fera florès dans le premier tiers du XXe siècle. Il y aura de la lumière : de larges portes cintrées (rappelant l’habitat navarrais), de grandes baies de tous côtés, y compris à l’ouest, des loggias… Les pièces seront spacieuses, décorées par de grands artistes (Gaston de la Touche, Georges Delaw) et confortables (eau et électricité). Edmond Rostand aime y recevoir ses amis et dépenser sans compter.

Lors de votre visite, vous admirerez le grand hall, le salon chinois (là encore, ce n’est pas très basque…), le bureau Empire, les appartements de Monsieur, ceux de Madame (avant leur séparation en 1915), les logements du personnel au deuxième étage : une demeure bourgeoise et cossue du début du siècle.

Et puis, il y a le jardin. Là aussi, Rostand le poète a des idées bien précises : il veut un grand jardin à la française, un plus petit jardin à l’anglaise et même un jardin « alpin », avec faux éboulis de roches, tout cela dans une forêt reconstituée, avec de très beaux arbres.

Au final, vous visiterez une demeure étonnante qui mêle la vanité de Chantecler, la tendresse du Cantique de l’Aile, la complexité de Cyrano ou la légèreté des Romanesques. Nous sommes décidemment bien en présence de la maison d’Edmond Rostand !

 

François Bregaint  – Présent

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