Après des études d’anglais et des cours d’art dramatique, c’est en tant qu’acteur que John Cassavetes, fils d’immigrés grecs, commence sa carrière cinématographique. Il joue son premier rôle dans Fourteen hours (1951) mais n’est pas crédité au générique. Dans les années cinquante, il apparait dans un grand nombre de productions au cinéma, notamment Face au crime de Don Siegel, et à la télévision. En 1959, il est Johnny Staccato dans la série américaine du même nom.
En 1956, John Cassavetes fonde à New York un atelier théâtral, le Variety Art Studio. Il fait travailler à ses élèves des improvisations qui serviront de base à son premier film en tant que réalisateur. Shadows (1961) met en scène des adolescents noirs dans un New York filmé de façon quasi documentaire sur une musique du jazzman Charles Mingus. Tourné caméra à l’épaule et en 16 millimètres, ce film dégage une liberté et une intensité qui valent à Cassavetes le prix de la critique au Festival de Venise, et font surtout de lui un pionnier du cinéma indépendant américain, aux cotés de Shirley Clarke ou Jonas Mekas.
Ce nouveau talent est dès lors convoité par Hollywood. Il tourne pour la Paramount son deuxième film, La Ballade des sans-espoirs, un échec commercial, puis pour United artists Un enfant attend (A child is waiting), mais cette expérience douloureuse (Cassavetes doit abandonner le montage final du film à son producteur Stanley Kramer) l’éloignera pour longtemps des studios. On retiendra d’Un enfant attend qu’il s’agit du premier film dans lequel apparaît Gena Rowlands, son épouse depuis 1954. Celle-ci sera par la suite l’héroïne de ses plus grands films, dans lesquels elle interprètera des rôles riches et complexes: mère de famille au bord de la folie dans Une femme sous influence, ou comédienne en crise dans Opening Night .
Pour financer ses films, Cassavetes continue sa carrière d’acteur. Son rôle dans Rosemary’s Baby, de Roman Polanski, lui permettra de réaliser en 1965 Faces, qu’il tourne pendant six mois dans sa propre maison. Avec ses longs plans-séquences, c’est un retour au style de Shadows. A la même époque, Cassavetes est l’un des Douze Salopards, dans le film de Robert Aldrich.
Autour du couple John Cassavetes – Gena Rowlands se constitue peu à peu une famille d’acteurs, en particulier Peter Falk, Seymour Cassel et Ben Gazzara. Cassavetes aime filmer des individus en marge d’une société américaine conformiste et aliénante. Les virées dans des bars enfumés et des boites de nuit, les scènes de ménages où circulent des Torrents d’amour – titre d’un film qui obtient en 1984 l’Ours d’or à Berlin)-, sont récurrentes dans l’univers du cinéaste. Son goût pour des personnages à la dérive se remarque jusque dans ses incursions dans le thriller : Meurtre d’un bookmaker chinois, ou Gloria, l’un de ses rares succès commerciaux.
En 1986, John Cassavetes tourne son dernier film, Big trouble, à partir d’un scénario écrit par Andrew Bergman, alors qu’il est déjà malade. Depuis sa mort en 1989, son oeuvre singulière n’a cessé d’être redécouverte, notamment en France où, en 1992, une rétrospective de cinq de ses films récolte un grand succès. En 1997, Nick Cassavetes, fils de John et de Gena Rowlands, met en scène She’s so lovely, d’après un scénario écrit par son père dix ans plus tôt.