Que fait la ministre de la Culture à ce poste, pourquoi l’a-t-on mise là, quelle sera sa prochaine bourde, autant de questions que certains se posent, dans la “profession”. A l’occasion du Festival d’Avignon, et comme en réponse, Aurélie Filippetti nous donne une nouvelle comédie sur le thème de l’incompétence ou de l’inutilité…
Déjà, cet hiver, à Avignon, si j’en crois ce qui m’a été rapporté, elle en avait écrit et interprété le prélude avec brio, lors d’un discours prononcée en novembre 2013, devant les responsables socialistes de la ville et la future maire qu’elle était venue soutenir. Dans une envolée digne d’un personnage de Ionesco, et où éclata toute sa connaissance du sujet, elle déclarait : “Il est dommage qu’il ne se passe rien à Avignon l’hiver !” Ce même soir, à une centaine de mètres de là, dans l’une des Scènes Permanentes d’Avignon, comble pour la circonstance, plus de trois cents spectateurs applaudissaient avec enthousiasme une création théâtrale (à savoir ma dernière pièce, Le Tartuffe Nouveau, proche bientôt des 10 000 spectateurs, mais à laquelle le Centre National du Théâtre a refusé l’Aide à la Création ) !
Je vous laisse imaginer la joie du directeur de ce lieu et metteur en scène de la pièce, également fondateur de ce théâtre de réputation nationale et internationale et qui depuis quarante cinq ans justement oeuvre pour qu’il se passe quelque chose à Avignon toute l’année, et au delà, et y réussit avec un talent que personne ne conteste… Apparemment, la Ministre ne savait pas qu’il existe plusieurs Scènes Permanentes, ne connaissant de cette ville que le Palais des Papes et les papes de la Culture Officielle !
Mais tout cela n’était qu’un début. Avec l’été, et le retour du célèbre Festival, cette fois “ il se passait enfin quelque chose à Avignon”, et la ministre brûlait d’y assister et de se montrer. Hélas, comme dans ces films ou ces pièces où la répétition des infortunes du héros constitue le principal ressort comique, son voyage s’avéra calamiteux! Et la suite de ses aventures devint une succession de gags, un spectacle burlesque que le Festival 2015 pourrait mettre l’an prochain dans sa programmation.
Voulant à toute force rencontrer ses bons amis les intermittents (peut-être ne savait-elle pas non plus qu’ils étaient vraiment en colère), et montrer tout l’intérêt qu’elle porte à leur cause et à la création théâtrale, la ministre, nous dit la presse, se rendit à Avignon, d’abord, prudemment, hors-remparts, et après une conférence de presse express de six minutes – deux fois le temps de cuisson d’un oeuf à la coque ! -, dans un mouvement d’enthousiasme conquérant, elle franchit les murs et s’en vint au village du off, d’où elle dût s’enfuir en courant sous les huées, les quolibets et les invectives de ses bons amis.
Pendant ce temps, à Paris – il est des jours vraiment où même lorsqu’on est ministre, il vaudrait mieux ne pas se lever ! -, le candidat qu’elle avait sollicité et soutenu pour la Comédie-Française était refusé à son tour, et c’est un autre qui était choisi par le Président Bonne Blague, jamais en reste dès lors qu’il s’agit d’une nouvelle facétie. Désavouée à Paris, chassée d’Avignon, déclaréepersona non grata, sifflée, interdite de théâtre, la ministre n’avait plus qu’à repartir, déconfite, peut-être à l’Ile Maurice, où elle pourrait se reposer dans un hamac à l’ombre des cocotiers.
Reste une interrogation grave, un dilemme tragique : entre les créations qu’elle ne va pas voir, parce qu’elle ignore qu’elles existent, et les créations qu’elle ne peut pas voir parce qu’on la met dehors, que va-t-il rester à la ministre de la Culture pour approfondir la sienne en matière de théâtre ? Peut-être faudrait-il organiser un séminaire gouvernemental sur la question !
Jean-Pierre Pélaez