Jeûner la journée pour se retrouver en famille sitôt le soleil couché. Jusqu’au 17 juillet, les 4 millions de musulmans qui pratiquent le ramadan en France vont doper l’économie du marché «oriental». La consommation alimentaire des foyers augmente de 40% pendant cette période. Les ménages dépensent en moyenne 394 euros pendant le ramadan contre 280 euros par mois le reste de l’année, selon une enquête du cabinet SolisFrance. Plus de 350 millions d’euros sont ainsi dépensés en un seul mois. Un créneau que la grande distribution ne manquerait pour rien au monde.
Les habitudes alimentaires des musulmans qui pratiquent le ramadan varie pendant ce mois de jeûne. Soupes, feuilles de brick, dattes et lait fermenté constituent le terreau des repas traditionnels. Mais pour des raisons pratiques, des aliments plus conventionnels deviennent à leur tour très prisés. Cornflakes, barres de céréales, yaourts et autres fromages frais constituent ainsi la dernière collation avant le début du jeûne de la journée. Les grandes surfaces adaptent donc leur offre alimentaire. Des produits tels que les boulettes d’agneaux, des pâtisseries orientales, des fruits secs sont mis en avant pour une période précise allant du 10 juin au 18 juillet. La plupart propose également une offre non-alimentaire «art de la table» avec de la vaisselle spécialement dédiée.
Plus encore que d’en profiter, la grande distribution entend bien dôper la consommation de ces produits pendant le ramadan à coups d’annonces promotionnelles. Lidl propose cette semaine de découvrir les «délices et merveilles d’orient» dans son catalogue. Même chose pour Carrefour avec des «couleurs et saveurs venues d’ailleurs» ou encore Auchan et ses «saveurs orientales à prix doux». À noter que le ramadan n’est jamais explicitement mentionné dans ces publicités.
En dix ans, le marché du halal français a connu une croissance exponentielle. Son chiffre d’affaire dépassait 5,5 milliards d’euros en 2013, selon SolisFrance. Une somme principalement issue du panier de la ménagère. La consommation hors-domicile pesant moins du milliard. De quoi attirer toutes les convoitises, notamment celles des géants de la distribution. Carrefour et Casino ont tous deux créé leur marque distributeur spécialisée, il y a cinq ans, sans toutefois connaître le succès espéré.
… mais restent encore à la traîne
Les boucheries halal et autres épiceries orientales restent les plus prisées par les musulmans pratiquants et continuent de dominer le marché. Plus de la moitié des dépenses alimentaires durant le ramadan sont réalisées dans le circuit traditionnel, note Abbas Bendali, directeur du cabinet SolisFrance, bien que la balance tend vers l’équilibre. «On sait qu’on a une longueur d’avance sur ce secteur. Il faut l’entretenir…», lance un vendeur d’une épicerie halal de la capitale. Concernant la viande halal, elle reste à 90% le monopole de la boucherie de quartier. La raison: des prix compétitifs et un commerce de proximité qui assurent une certaine confiance concernant la provenance des produits. «La crise de la viande de cheval a eu son impact», rappelle Abbas Bendali.
Tous les acteurs de l’industrie halal sont prêts d’autant que le grand rush a déjà commencé pour eux. «Les semaines les plus intenses sont celles qui précèdent le début du ramadan ainsi que la première semaine du jeûne, au moment où les pratiquants remplissent encore leur frigo», explique un autre commerçant spécialisé halal. Le commerce en ligne n’est pas en reste. «La hausse pendant le ramadan est principalement due au fait que notre clientèle consomme davantage, mais on attire également de nouveaux clients qui tombent sur notre site en faisant des recherches sur Internet pendant cette période», étaye Samir Amdouni, gérant de la boucherie halal en ligne Dinam. Ses commandes observent une hausse de plus de 40% pendant les deux seules premières semaines, confirmant les chiffres de SolisFrance.
À partir du 18 juillet, ce sera autour des pâtissiers halal d’en profiter avec la fête de la fin du ramadan. Elle sera suivie des célébrations de l’Aïd deux mois plus tard.