Le musée de l’Armée des Invalides propose une exposition très documentée sur l’entrée en guerre des Américains en 1917. Avec un titre d’accroche devenu emblématique : « Lafayette, nous voilà ! » Cette formule a longtemps été attribuée au général Pershing qui, disait-on, l’avait prononcée pour l’Independence Day, le 4 juillet 1917, sur la tombe de Lafayette au cimetière de Picpus à Paris. En présence de l’ambassadeur des Etats-Unis et de Painlevé.
L’auteur en est, en fait, le colonel Stanton, à qui Pershing avait confié de prononcer l’allocution officielle. Ce que Pershing confirme dans ses Souvenirs de guerre : « J’avais désigné, pour parler à ma place, C.E. Stanton de mon état-major, un vieux compagnon d’armes qui était quelque peu orateur. » Mais, on le sait, quand la légende est plus belle que l’histoire…
L’entrée en guerre des Sammies aux côtés des Poilus et des Tommies marqua un tournant – et un tournant décisif – dans la suite des événements. La vingtaine de panneaux présentés dans la cour d’honneur des Invalides font le lien entre la guerre d’indépendance des Etats-Unis, où l’aide de Louis XVI fut déterminante, et l’engagement américain aux côtés des Français, des Belges et des Britanniques.
Il ne faudrait pas oublier (et l’exposition des Invalides prend garde de ne pas le faire) que de nombreux Américains avaient choisi de s’engager contre l’Allemagne dès le début du conflit, à une époque où leur gouvernement avait opté pour la neutralité. On pense bien sûr à la légendaire Escadrille Lafayette (1), créée en 1916 et composée d’aviateurs américains. D’ailleurs, après la visite de l’exposition, on ne saurait trop conseiller de se rendre au Mémorial Lafayette de Garches (Hauts-de-Seine) qui perpétue le souvenir de ces volontaires (2).
Le 13 juin 1917, le général Pershing débarque à Boulogne-sur-Mer à la tête d’un important corps expéditionnaire. A partir de cette date, quelque 200 000 Sammies par an transiteront par la région de Saint-Nazaire. Photos, peintures, dessins, affiches, rendent excellemment compte de ce momentum. Qu’on pourrait résumer par ce fusain de Forain où l’on voit un Poilu dire à un Feldgrau, sur fond de soldats américains : « Te v’la fixé maintenant… Tu vois que c’est pas des touristes… »
Pour réaliser cette exposition, le musée de l’Armée a puisé dans ses collections et ses fonds documentaires, mais s’est aussi associé avec deux institutions partenaires : la Bibliothèque de documentation internationale contemporaine de Paris X-Nanterre et l’Etablissement de communication et de production audiovisuelle de la Défense. Qui possèdent manifestement des « trésors ».
Le 3 novembre 1917, en terre lorraine, les trois premiers Sammies tombés dans les champs de France s’appelaient : J.-B. Gresham (caporal), M.D. Hay (simple soldat), T.F. Enright (simple soldat).
L’exposition du musée de l’Armée (l’entrée est gratuite) est la première grande manifestation d’une série d’hommages et célébrations prévus en France, en 2017, pour le centenaire de cette entrée en guerre.
(1) Face à l’affluence des candidats, il faudra y ajouter, en 1917, le Lafayette Flying Corps.
(2) D’autres s’engageront dans la Légion étrangère ou rejoindront des organisations d’ambulanciers bénévoles comme l’American Field Service, la Réserve Mallet ou le Norton-Harjes Ambulance Corps.
Musée de l’Armée, les Invalides. Jusqu’au 9 avril 2017.
Illustration en Une: « Illusions perdues » (fusain de Forain, 23 juillet 1918 ; coll. personnelle Alain Sanders).
Alain Sanders – Présent