La fête de la Rosière, vous connaissez ? Instituée au Ve siècle par saint Médard, elle consistait à remettre une couronne de roses à la jeune fille la plus vertueuse du village. La tradition a été abandonnée en 1987 par Salency, dans l’Oise, où naquit le saint, mais la petite commune envisage de la remettre au goût du jour l’an prochain. Pas très tendance, par les temps qui courent. Alors, tollé sur les réseaux sociaux, mails insultants et même pétition : Hervé Deplanque, le maire, qui n’était pas contre, maintenant tergiverse. Pourtant, souligne Bertrand Tribout, le président de la Confrérie Saint-Médard, il ne s’agit que d’élire « quelqu’un de sympathique, au final » !
Car contrairement à ce que répète Laélia Véron, l’initiatrice de cette pétition, il ne sera pas exigé de la Rosière « pureté et virginité ». Alors, puisque Bertrand Tribout n’ira sonder ni les reins ni les culottes des candidates, que peut-il bien lui demander, à sa future Rosière, pour déclencher leur haine, à ces signataires ? Elle devra être réputée pour son « dévouement à sa famille, à [sa] disposition à faire le bien et à éviter le mal, être toujours de bonne humeur et souriante » et avoir une « propension à aider les autres ». C’est vieux jeu ? Des qualités pourtant fort appréciées d’un certain type d’associations. Passons.
Mais où va-t-on, je vous le demande, si les filles ne peuvent plus se montrer ingrates et égoïstes ? Et scandaleux, n’est-ce-pas, qu’en 2018, des jouvencelles se sentent bien dans leurs baskets, ne se lèvent que rarement mal lunées et n’éprouvent aucun dégoût à rendre service ! Mais, dites donc, elle ne va pas être facile à dénicher, cette Rosière salencienne ! Détrompez-vous ! Des garçons (de cortège) et des filles de bonne nature et bien élevés, « on en a déjà plus qu’il n’en faut », annonce Bertrand Tribout. Ah, ce n’est pas comme au bon vieux temps des films de Jean Boyer ! En 1950, au village ? Toutes des dévergondées ! Pas une seule fille, parmi les trente, digne de devenir la Rosière ! Mme Husson dut se rabattre sur… un Rosier ! Le benêt du village, délicieusement interprété par Bourvil, qui a raflé le prix, les lauriers et, pas si benêt… la Marie !
Affligeants et ignorants, ces pétitionnaires. Car, en fait, des fêtes catholiques de la Rosière, il en existe plein. L’année dernière, Moissac en a même élu deux : une « adorable et méritante »Moissagaise, mais aussi la Rosière de la France entière. Une fête bon enfant à laquelle se presse chaque année un public nombreux. Eh oui.
N’en déplaise aux mauvais coucheurs obsédés par la laïcité – c’est un prêtre, en plus, qui couronnera la lauréate ! -, en même temps que bouche cousue quant à une autre religion qui, de notoriété publique, érige la virginité en condition sine qua non ; n’en déplaise à ces gens de mauvaise foi, qui s’offusquent de la dépense d’argent public (on ne rit pas), célébrer le bien, le beau et l’esprit de service – des qualités nobles, pouah !- à travers ces saines jeunes filles, c’est autrement plus rafraîchissant que de tomber sur des Madonna, des Miley Cirus ou des Lady Gaga qui exhibent leur intimité, ou de voir et d’entendre des rappeurs beugler des cochonneries, en se tortillant du c…, à l’Élysée !
CarolineArtus – Boulevard Voltaire