De la “connerie” télévisuelle, ailleurs et partout!

Choc des cultures ou choc des civilisations ? La chose n’est pas tranchée et je me garderai bien d’apporter une réponse à cette épineuse question qui continue d’agiter les esprits forts. Ce que je peux affirmer, en revanche, c’est l’expansion universelle de la connerie télévisuelle. Qu’on me pardonne le mot grossier, mais je n’en trouve pas d’autre. Il est en effet stupéfiant de constater à quel point les émissions les plus bêtes se diffusent à travers la planète, copiées dans le concept et agrémentées ici puis là de « spécialités locales » qui ajoutent à leur charme… Je parle ici tout particulièrement de la « télé-réalité ».

On note, d’ailleurs, qu’il existe dans ce domaine aussi des modes. Les thèmes sont empruntés aux faits de société les plus marquants. Ces deux dernières années, les migrants sont à l’honneur. On rejoue l’histoire d’hier et celle d’aujourd’hui stimule les scénaristes. Il y a tout juste un an, la télévision belge reprenait ainsi les droits d’un « concept de télé-réalité australienne plaçant les candidats dans une position de réfugiés migrants ». L’émission imaginée par les Australiens en 2012 s’intitulait: « Go Back To Where You Came From », c’est-à-dire « Retourne d’où tu viens ». Les six candidats y vivent « les mêmes déboires que les vrais réfugiés : traversée à bord de frêles embarcations, arrivée dans des camps de réfugiés sans argent, sans papiers ni téléphone. Les candidats vont à la rencontre des vrais réfugiés, partagent leur quotidien et affrontent les préjugés. L’exposition à des défis physiques et émotionnels semble être au cœur du concept. » Top fun, comme on dit là-bas. On ne sait pas si la Belgique a persévéré ou si la reprise est restée à l’état d’intention.

Avec « Dovolená v Protektorátu », c’est-à-dire « Vacances dans le protectorat », les Tchèques, eux, offraient à leurs candidats de revivre l’occupation nazie. Un moment de franche rigolade. La productrice, bien sûr, se défendait de tout mauvais goût : « Nous sommes conscients qu’évoquer cette période de troubles est sujet à controverse. Mais nous pensons qu’il n’y a rien de mal à faire cette émission, sachant que nous faisons très attention à ce que certaines règles éthiques et la réalité historique soient respectées. » Et où s’arrête la reconstitution ?

Les très méchants, aujourd’hui, sont des barbus vêtus de noir qui brandissent des kalachnikov. Le monde tremble devant les terroristes de Daech, alors pourquoi ne pas les mettre en scène ? Bonne idée, non ? Si bonne qu’en ce mois de ramadan, la télé égyptienne a diffusé une émission de caméra cachée avec « de faux kidnappings » perpétrés par Daech. Ça s’intitule « Mini-Daech ».

C’est Al-Arabiya qui raconte : dans la première émission, « les producteurs invitent l’actrice égyptienne Heba Magdy dans un grand appartement quand, soudain, de faux djihadistes font irruption en hurlant et brandissant leurs armes. Le faux kidnapping dure environ quinze minutes, avec faux drapeau de Daech inclus. L’actrice hurle et pleure, convaincue qu’il s’agit de vrais terroristes. Un faux djihadiste tente de lui mettre une fausse ceinture d’explosifs. Etant donné que des groupes liés à Daech ont mené plusieurs attaques meurtrières en Égypte depuis 2013, son effroi semble plutôt normal. Lorsque de fausses sirènes de police se font entendre, les faux djihadistes rigolent et expliquent qu’il s’agissait d’une blague. »

Qu’est-ce que c’est drôle, on se tient les côtes. Il paraît, néanmoins, que des députés égyptiens ont demandé l’interdiction de l’émission. On se demande bien pourquoi !

Marie Delarue – Boulevard Voltaire

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