Deux semaines après avoir été érigé en modèle de «l’avant-garde» des banlieues en Une des Inrocks, l’ex-journaliste Mehdi Meklat est au cœur d’une polémique sur les réseaux sociaux. En cause : d’anciens tweets ouvertement antisémites ou racistes.
Dans son numéro du 1er février, Les Inrocks allaient à la rencontre de Christiane Taubira, mais aussi de «Mehdi et Badrou, 24 ans chacun, [qui] ont été chroniqueurs à France Inter [et] journalistes au Bondy Blog». Ce dernier est un média hébergé par Libération et partenaire des chaînes publiques LCP et France Ô, qui se donne pour objectif de «raconter les quartiers populaires». Le magazine de la gauche branchée décrit alors les deux jeunes hommes comme «l’avant-garde d’une nouvelle génération venue de banlieue qui compte bien faire entendre sa voix»…
Deux semaines plus tard, une multitude d’anciens tweets écrits par l’un de ces deux représentants de «l’avant-garde» des banlieues – Mehdi Meklat – étaient déterrés par des internautes, provoquant l’indignation de nombre d’entre eux. Le contenu politiquement incorrect (c’est le moins que l’on puisse dire) de certains de ces tweets, en effet, a de quoi faire défriser plus d’un lecteur des Inrocks. «Pourquoi les juifs ont le droit de prendre le métro [?]», s’interrogeait ainsi Mehdi Meklat dans un tweet d’avril 2014.
De même, peut-on lire sur un tweet de 2012 : «Sarkozy = la synagogue = les juifs = shalom = Oui, mon fils = l’argent #ToiAussiFinanceLaCampagneDeSarkozy».
Parmi les très nombreuses autres «perles» du compte Twitter de Mehdi Meklat, on trouve par exemple : «LES BLANCS VOUS DEVEZ MOURIR ASAP» [«As soon as possible», soit «aussi vite que possible»]…
…«Faites entrer Hitler pour tuer les juifs #César2012»…
… «Christophe Barbier a fait des enfants seropo !» – message accompagné de ce qui semble être une photographie de Matthieu Delormeau, animateur télévisé ouvertement homosexuel…
… ou encore : «Je suis dans ma salle de bain. Je me sens un peu Mohamed Merah» !
Nausée sur les réseaux sociaux
Ces messages à l’antisémitisme, au racisme ou à l’homophobie francs, ont provoqué le dégoût de nombreux internautes. Celui-ci a par exemple évoqué des «tweets nauséabonds», et s’est étonné que l’ex-Garde des Sceaux ait pu accepter de partager la couverture des Inrocks avec leur auteur.
Similairement, cet utilisateur de Twitter s’est demandé avec horreur ce que pouvait dire Mehdi Meklat en privé, s’il tenait de tels propos publiquement sur Twitter.
L’universitaire Laurent Bouvet a lui aussi manifesté sa sidération à la découverte des tweets du jeune ex-journaliste du Bondy Blog adulé par Les Inrocks…
… de même que le célèbre dessinateur de bandes dessinées Joann Sfar.
Un «personnage fictif» ?
Réagissant, le 18 février, à ce tollé, Mehdi Meklat s’est fendu de plusieurs tweets censés justifier ses étranges messages (sans nier, donc, qu’il en était l’auteur). D’après ses dires, l’ex-journaliste et bloggeur incarnait jusqu’en 2015 sur Twitter «Marcelin Deschamps», «un personnage honteux raciste antisémite misogyne homophobe»… à travers qui il «questionnai[t] la notion d’excès et de provocation».
Il est pourtant à noter que Mehdi Meklat lui-même confondait, dans certains messages, son «personnage» fictif et sa propre personne. En mars 2013, par exemple, le jeune homme retweetait la photographie d’un article signé de son vrai nom (Mehdi Meklat)… décrit comme un «papier de @MarcelinDchmps».
Par ailleurs, le compte Instagram au nom de Marcelin Deschamps, toujours actif aujourd’hui et visiblement tenu par Mehdi Meklat, relaie des informations sur la vie de ce dernier (rencontres, passages à la télévision…), sans distance ni ironie. Un cliché de la séance photographique pour les Inrocks de Mehdi Meklat et de son ex-acolyte du Bondy Blog, de même que la couverture du magazine en question, ont justement été publiés sur ce compte Instagram au nom de Marcelin Deschamps !
Cette distinction supposée entre Mehdi Meklat et Marcelin Deschamps n’avait pas convaincu, en 2014, la rédaction du site Yagg (spécialisé dans l’actualité liée aux questions LGBT), qui avait dénoncé la «sérophobie» du jeune journaliste. «Je peux comprendre qu’on se sente insulté par mes tweets, car ils sont parfois extrêmes, provocants ou insultants, mais il ne faut pas en faire des tonnes», avait indiqué l’intéressé à Yagg. «Cette histoire n’a aucun fond, la mode est aux réactions, mais moi, ça ne m’intéresse pas. J’ai créé un personnage violent, provocant, méchant. Pourquoi ? Je ne me l’explique pas à moi-même, alors je ne peux pas l’expliquer aux autres», avait-il ajouté.
Les Inrocks, eux, avaient déjà fait savoir qu’ils jugeaient le fil Twitter de Mehdi Meklat/Marcelin Deschamps «drôle à en mourir».