Le marché de l’édition entre succès et prix littéraires…

Si le marché du livre n’a rien de florissant, on ne peut cependant que se réjouir de sa relative bonne résistance aux périls qui le menacent et notamment aux deux principaux d’entre eux. L’inexorable montée de l’inappétence pour la lecture de deux générations sacrifiées aux fantaisistes méthodes d’apprentissage, dont notamment la controversée méthode globale, d’une part, et le développement exponentiel des outils et contenus numériques ne laissant plus guère de temps pour se plonger dans les livres, d’autre part.

D’année en année, le temps quotidien passé devant de multiples écrans ne cesse de progresser, forcément au détriment du livre et en dépit des avertissements sur les effets néfastes attestés par de récentes études scientifiques.

Dans ce contexte et après plusieurs années consécutives de baisse des ventes, l’édition avait néanmoins progressé en 2015, soutenue par un foisonnement de parutions, avec près de 3 000 nouveautés publiées à la rentrée 2015. Bien que la rentrée littéraire 2016 soit un peu moins féconde, elle aura quand même proposé 2 200 nouveautés, dont 560 romans publiés entre le 15 août et le 15 octobre. A titre d’ordre de grandeur, les 100 premières ventes nationales entraînent un chiffre d’affaires de 218 millions d’euros, part non négligeable du pactole annuel global des éditeurs estimé à près de 2,7 milliards d’euros. C’est dire si le marché de l’édition demeure dynamique.

Des prix littéraires à l’image de la société

La rentrée d’automne est aussi l’occasion du rituel bien rodé des prix littéraires dont plus personne n’ignore, espérons-le, qu’ils sont bien plus destinés à dynamiser les ventes qu’à distinguer des talents littéraires. Cette année, à l’instar de ce qu’il advient dans l’ensemble des activités d’une société en pleine mutation, l’essentiel des prix décernés aura été attribué à quelques représentants de la « diversité ».

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En 140 signes, notre Prix Goncourt 2016 les accumule : politiquement correct, grammaticalement incorrect.

Du célèbre Prix Goncourt décroché par Leïla Slimani, auteur franco-marocaine et ex-journaliste à Jeune Afrique, pour son roman Chanson douce, à Yasmina Reza, fille d’un ingénieur juif mi-russe, mi-iranien et d’une violoniste juive d’origine hongroise, raflant le Prix Renaudot pour son titre Babylone, il deviendra de plus en plus difficile de nier un remplacement accéléré de population. Le Prix Médicis 2016 revient à un Français d’origine polonaise, petit-fils de juifs communistes disparus à Auschwitz, dont le titre Laetitia ou la fin des hommes enchanta, semble-t-il, les jurés. Le Prix du roman FNAC 2016 revient, lui, à un Gaël Faye, un jeune franco-burundais, de mère tutsie, dont le premier roman Petit pays se voit ainsi promis à un avenir inespéré. La valeur n’attend sans doute pas le nombre des années et l’auteur en question, ayant œuvré deux années pour un fonds d’investissement, n’était par ailleurs connu jusqu’alors que pour un unique album de rap « Pili-pili sur un croissant au beurre », œuvre dont l’immortalité ne peut sans doute être garantie. Trader, mélomane, romancier à succès, il doit sans doute s’agir de l’identité heureuse promise par l’un des candidats aux élections primaires.

D’énormes succès littéraires pour des auteurs de droite

Ces mondanités évoquées, la bonne nouvelle vient des remarquables succès d’édition d’auteurs talentueux que leur prose situe sans équivoque à droite. La récente publication d’Eric Zemmour Un quinquennat pour rien s’est déjà envolée à plus de 100 000 exemplaires, digne suite d’un record historique du Suicide français vendu à 450 000 unités. Philippe de Villiers, après l’énorme succès de Le Moment est venu de dire ce que j’ai vu (250 000), récidive avec Les Cloches sonneront-elles encore demain ? ayant bénéficié d’une mise en place de 100 000 exemplaires suivie de 2 000 demandes de « réassort » par jour. Quant à Laurent Obertone, enchaînant succès sur succès – La France orange mécanique, La France Big Brother, Utoya – sa dernière publication Guérilla, Le jour où tout s’embrasa semble promise à un nouveau record. Dans un autre registre Patrick Buisson, fine plume notoire et ex-conseiller de Nicolas Sarkozy, peut s’enorgueillir de 100 000 ventes pour son livre-témoignage La Cause du peuple. L’histoire inédite de la présidence Sarkozy.

L’édition ne peut aujourd’hui se priver de ces talents résolument à contre-courant de la pensée unique et dont les ventes créent un irremplaçable chiffre d’affaires. Pour des livres vendus, en moyenne, autour de 22 euros, chaque tirage de 100 000 livres apporte donc arithmétiquement 2,2 millions de chiffres d’affaires, ce qui n’est pas rien. Ces ouvrages à succès ne font certes pas que des heureux et certains tenants revêches de la pensée unique s’en étouffent d’indignation, ne se consolant qu’à mesure du succès d’auteurs que leur xénolâtrie privilégie.

Ainsi, Le Monde du 4 novembre dernier titrait-il « Les prix littéraires donnent voix aux sans-voix », précisant avec gourmandise dans le corps de l’article : « Exit le cliché du mâle blanc âgé de 45 ans ». Faut-il traduire, en creux « Bienvenue à la femelle de couleur de moins de 45 ans » ? Si oui, autant l’exprimer clairement.

Arnaud Raffard de Brienne – Présent

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