Le collectif La Manif pour tous avait, en 2013 et 2014, rassemblé près d’un million de personnes pour s’opposer à la loi Taubira. Ce 16 octobre 2016, il est loin d’avoir rencontré le même succès : 24.000 manifestants selon la police, 200.000 selon les organisateurs. Sans doute le contexte actuel, marqué par les attentats, la menace islamiste ou celle de l’islamisation de la société, a-t-il contribué à faire passer au second plan la question du « mariage homosexuel ».
Pourtant, si LMPT réclamait l’abrogation de la loi Taubira, elle dénonçait également la « menace sur la liberté éducative » et la « diffusion du genre ». En outre, la loi Taubira ne concerne pas uniquement les quelque 8.000 couples homosexuels qui se marient en moyenne chaque année en France. Elle ouvre le champ à l’adoption par ces couples, à leur recours à la PMA « sans père » et à la GPA. La sociologue Céline Béraude a beau pérorer que « la catastrophe annoncée avec la loi Taubira n’est pas arrivée », on peut être circonspect : ne nous avait-on pas promis que le PACS ne serait pas le prélude au mariage homosexuel ? Et Tugdual Derville n’a pas tort d’affirmer que, « en mal de reconnaissance, [le gouvernement] est entraîné dans une surenchère dans la dérive sociétale ». D’où le mot d’ordre de la manifestation : « Ne plus subir. »
20 Minutes souligne également que « rares étaient les ténors de la droite à se joindre ce dimanche au mouvement ».
Seuls, en effet, parmi les candidats à la présidentielle, Jean-Frédéric Poisson et Nicolas Dupont-Aignan étaient présents, et peu nombreux les non-candidats comme Marion Maréchal-Le Pen, Hervé Mariton ou Bruno Retailleau, par exemple. François Fillon, qui a promis de réviser la loi Taubira pour y inscrire le « principe qu’un enfant est toujours le fruit d’un homme et d’une femme » (sic), s’est pour sa part contenté d’envoyer samedi un vague message « de soutien et de sympathie » depuis le Maroc, où il est fort opportunément en déplacement. Courage, fuyons ?
C’est possible. En effet, si le président de Conseils, analyses et perspectives (CAP) affirme que les politiques « ont intégré qu’il serait difficile […] de revenir sur la législation du mariage pour tous, qui est perçue comme une avancée sociale par la majorité des Français » (ce qui reste à prouver), pour Ludovine de La Rochère, « ils craignent […] d’être accusés par quelques associations LGBT d’être homophobes, radicalisés ou extrémistes ».
Et, de fait, le cortège a été perturbé par des Femen. Accusant les manifestants « d’avoir déversé leur homophobie dans toute la France pendant des mois », elles concluent : « Ne laissons pas leurs morales religieuses infester la démocratie, ne laissons pas le ver entrer dans la pomme. » Qu’elles ne voient pas d’autre ver que celui-là dans la démocratie, c’est leur problème. Mais que BFM ait titré « Manif pour tous : des Femen frappées et traînées à terre par certains militants », sans s’émouvoir qu’elles assimilent les conservateurs à des homophobes, est révélateur de l’idéologie qui gouverne les médias.
Mais le pompon revient sans doute à L’Obs, qui donne la parole à Jean-Luc Romero-Michel, président d’Élus locaux contre le sida, un des heureux « néo-mariés », comme il se définit lui-même. Pour lui, la Manif pour tous est un ramassis de « professionnels de la haine », qui « attaquent » la République et « crachent » sur la France. Et, évoquant « l’Existrans, une manifestation essentielle dédiée à la promotion des droits des personnes trans, des droits au mieux bafoués, au pire inexistants » (sic), il affirme : « Il est presque certain […] que cette marche humaine, pour le respect des droits, sera peu couverte, bien trop peu, en comparaison du marketing de la haine du lendemain. Après, nous pouvons peut-être espérer une forme d’équilibre et d’éthique de la part des journalistes » ? Mais c’était peut-être de l’humour ?
Christine Célérier – Boulevard Voltaire
Cette vidéo montrent des « antifas » agressant, aux cris de « On va vous pendre, bande de bâtards ! », un père de famille de La Manif Pour Tous (en compagnie de son épouse et de ses enfants) se rendant à la manifestation…