Ne croyez pas qu’elle soit en vacances : La République en marche ne chôme pas. Elle prépare le déménagement de son siège et s’apprête à publier les résultats du vote sur les statuts. Deux événements instructifs sur la véritable nature du parti présidentiel.
Après avoir occupé la tour Montparnasse, puis la rue de l’Abbé-Groult dans le XVe, LREM va prendre ses quartiers dans un hôtel particulier de la rue Sainte-Anne, dans le IIe arrondissement. Les bureaux ne sont guère plus spacieux que les précédents, mais ils seraient plus accessibles par les transports en commun et permettraient de mieux accueillir les adhérents, comme le souhaite Emmanuel Macron.
Selon les informations qui circulent, le coût du loyer mensuel serait de 31.000 euros, soit près de 370.000 euros par an. Une bagatelle, quand on sait que le parti touchera, en fonction des voix exprimées au premier tour des législatives et du nombre d’élus, une subvention annuelle de 21 millions d’euros, soit près de 100 millions d’euros sur le quinquennat. C’est le prix, paraît-il, de la démocratie.
« Le siège d’un parti d’envergure nationale, tout comme celui d’une entreprise, n’a pas seulement une fonction utilitaire mais doit être à l’image du parti », expliquait au Figaro le président d’une société spécialisée dans l’immobilier. Quoi de plus symbolique, pour LREM, que cet hôtel particulier situé à proximité du Palais-Royal, du palais Garnier et de la Bourse ? Le pouvoir, la culture et la finance : l’élite, quoi ! Le trompe-l’œil, aussi, si l’on y ajoute le musée Grévin, qui n’est pas loin.
En comparaison, les autres partis font figure de pauvres. Les socialistes, suite à leur déconfiture, devraient se séparer de leur siège de la rue de Solférino, Les Républicains, après la rue de la Boétie, se contentent de la rue de Vaugirard, tandis que les « populistes » du Front national et de La France insoumise sont excentrés en banlieue, les premiers à Nanterre, les seconds à Massy.
LREM veut donc affirmer sa supériorité jusque dans le choix de son siège. Mais les militants se presseront-ils pour le fréquenter ? Jeudi, on connaîtra le résultat du vote sur les statuts, qui n’aurait pas beaucoup mobilisé. Fin juillet, seules 25.000 personnes se seraient prononcées. C’est peu au regard des 370.000 adhérents que le mouvement revendique. Sans compter les soupçons de fraude…
De plus, des militants dénoncent l’absence de démocratie interne. Eux qui espéraient, enthousiastes, pouvoir faire de la politique autrement constatent amèrement que les statuts cantonnent les militants dans le rôle de « supporters » et les excluent de la gouvernance. Fallait-il attendre autre chose d’un parti au service exclusif de Jupiter ? Je ne sache pas que le dieu de l’Olympe soit un grand démocrate : il sait mieux que personne ce qui est bon pour les Français.
Mais qu’importe ! La République en marche continue de faire illusion – ou, plutôt, de se faire des illusions. Déjà, la révolte gronde, ici et là. Un collectif des Marcheurs en colère a été créé dans le Pas-de-Calais pour s’opposer à l’investiture d’un vieil élu du MoDem aux élections sénatoriales. En matière de renouvellement, on peut faire mieux.
Gageons que de plus en plus de Français se mettront en colère et le manifesteront chaque fois qu’ils en auront l’occasion. Car La République en marche devient un parti comme les autres, pire même que les autres, puisqu’il s’est fondé sur une forme d’imposture. Quelqu’un pourrait lancer la fabrication de tee-shirts portant l’inscription « Macron m’a tuer » ou « Français en colère » ? Une start-up promise à un bel avenir !
Ce n’est pas La République en marche qui va siéger rue Sainte-Anne, c’est La République à reculons !
Philippe Kerlouan – Boulevard Voltaire