Le cas Toubon…

Les mots fourniture, fourrage, fournil, voire boulanger et petit mitron, seront-ils bientôt expurgés du vocabulaire courant et des dictionnaires sous prétexte qu’ils évoqueraient de près ou de (très, très) loin les crématoires-de-sinistre-mémoire ? Mais, ces derniers jours, le prétendu dérapage de Jean-Marie Le Pen, trop vite transformé en « faute politique » par certains de ceux qui lui doivent tout, n’a pas été seul à alimenter la polémique. Tout comme le Front national, le Parti socialiste a lui aussi connu son psychodrame avec la nomination par François Hollande de Jacques Toubon comme Défenseur des droits, en remplacement de feu Dominique Baudis. Comment, se sont indignés les gardiens du temple à la rose, l’ancien Premier secrétaire du PS a-t-il pu choisir pour une telle fonction celui qui  fut secrétaire général duRPR de 1984 à 1988 ? Trahison des Immortels Principes, ont clamé certains députés socialistes, injure aux Grands Ancêtres, ont vitupéré les autres, tous annonçant leur refus de ratifier le 2 juillet l’incompréhensible décision présidentielle.

  Jacques Toubon ou la « force injuste de la loi » Gayssot

Pourtant, nul n’ignore ou ne devrait ignorer les liens privilégiés entre Chirac, dont Toubon est un féal, et Hollande, le premier ne s’étant pas caché d’avoir voté pour le second en mai 2012.

D’autre part, le promu n’a rien d’un réac. Tout comme son chef de file, il vota le premier article de la loi Badinter abolissant la peine capitale. Ministre de la Culture de 1993 à 1995, il respecta pieusement le calamiteux héritage de Jack Lang, en rajoutant même dans les concessions et les cadeaux aux cultureux portés au pinacle et si fastueusement stipendiés sous – et par – son prédécesseur.

Mais c’est comme garde des Sceaux de 1995 à 1997, sous la présidence de Jacques Chirac et l’autorité d’Alain Juppé officiant à Matignon, que Jacques Toubon montra avec éclat que, régulièrement élu député de Paris par les braves gens de droite, voire d’extrême droite, il se situait en réalité à l’opposé de l’échiquier politique.

Lors de l’adoption en juillet 1990 de la loi Gayssot (du nom de l’élu communiste ayant déposé cette proposition de loi scélérate reprise à son compte par le gouvernement Rocard et inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée par Laurent Fabius, qui siégeait alors au “Perchoir”, dans l’hystérie suscitée par la profanation de Carpentras faussement attribuée au FN), Jacques Toubon avait certes voté contre. Mais, à peine arrivé Place Vendôme, il se révéla un prescripteur enragé de cette loi qui, sous prétexte de « réprimer tout acte raciste, antisémite ou xénophobe », nous a en réalité « dotés d’une vérité historique d’État, subvertissant ainsi radicalement la notion même de vérité historique  », ainsi que l’avait si justement écrit Jean Madiran dans “Présent”.

C’est donc sous son règne que la « répression fulgurante » théorisée en 1994 par son intime ami Patrick Gaubert, futur président de la Ligue contre le racisme et l’antisémitisme (LICRA), que, je le dis hélas d’expérience, la loi Gayssot-Rocard-Fabius, cette « loi abjecte » de l’aveu même de l’avocat du “Monde”, Me Baudelot, fit le plus de dégâts. Et de victimes.

Seuls les naïfs s’étonneront donc que ce grand inquisiteur passé par l’école stalinienne ait pu faire acte de candidature comme “Défenseur des droits”.

Au demeurant, Jacques Toubon estimait avoir bien d’autres “états de service”  à son actif. Par exemple, dès lors que les électeurs, dont les yeux s’étaient enfin dessillés, se détournèrent de lui, son inlassable action en faveur de la “diversité” comme président – nommé par Chirac – de la Cité nationale de l’histoire de l’immigration ayant supplanté le Musée des Colonies. Ou encore, à l’initiative cette fois de Nicolas Sarkozy, comme secrétaire général du Cinquantenaire des indépendances africaines dont la célébration s’acheva en 2011 et pour laquelle il s’était fait seconder bizarrement, au Congo notamment, par l’indispensable Patrick Gaubert, dont on discerne mal la communauté de destin avec le Tchad ou le Niger.

Dans les deux cas, M. Toubon, qui se targue d’avoir milité pour la primauté du français sur l’anglais, se fit cette fois plutôt le champion des intérêts allogènes contre l’intérêt national.

Défenseur des droits… contre la famille

On comprend donc que François Hollande ait été séduit. Quoi de mieux qu’un prétendu homme de droite pour faire avaler les “droits” des lobbies les plus extrémistes, acharnés à détruire la famille traditionnelle et la loi naturelle ?

Car voyez plutôt ce qu’écrit en défense et illustration du candidat – désormais très mal parti – un militant LGBT, Eric Walter, sur le site Rue89, dépendant du “Nouvel Observateur” : « L’homme que je connais n’a pas l’ombre d’une idée discriminante envers les personnes à raison de leur sexualité. J’irai même plus loin, nos discussions nous ont naturellement amenés à parler de la PMA (procréation médicalement assistée) et de l’évolution des modes de procréation dans la société […]. Très loin du défenseur psychorigide de la famille patriarcale dont on souhaite lui coller l’étiquette, Jacques Toubon est un humaniste qui […] rejette violemment toute forme de discrimination quelle qu’en soit la raison et en particulier l’orientation sexuelle. Arrêtons les faux procès ! » Surtout les «  procès en sorcellerie dignes des grands procès moyenâgeux ».

En revanche, instruisons encore et toujours le procès en sorcellerie de Le Pen ! Dont, à l’heure où l’Irak est menacé d’une sanglante implosion avant d’être promu califat par les djihadistes, on rappellera la lucidité et le courage quand, à l’été 1990, il fut le premier et longtemps le seul à condamner – y compris au risque de déboussoler son propre électorat –, le projet d’une intervention occidentale ne pouvant semer selon lui qu’anarchie et chaos. Au sein même du Front, certains parlèrent – déjà – de« faute politique ». Qui, pourtant, se montrait alors visionnaire ?

Camille Galic

 

 Lu sur Présent

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