Les campagnes d’affichage antiracistes récurrentes, les déclarations politiquement correctes de certains de ses dirigeants tout comme la signature, en 2014, d’une convention avec SOS Racisme prévoyant l’intervention de militants de cette association lors de la formation des agents de la SNCF n’auront donc pas suffi.
Depuis lundi, en effet, la cour d’appel de Paris examine quelque 832 dossiers d’anciens cheminots de nationalité ou d’origine marocaine qui, estimant avoir été « spoliés » par rapport aux cheminots français, ont poursuivi l’entreprise pour « discrimination ».
Les « Chibanis » connaissaient la réglementation
Au départ de cette affaire, le recrutement par la SNCF, dans les années 1970, de près de 2 000 Marocains, en vertu d’une convention signée entre la France et le Maroc qui, à en croire le Défenseur des droits, Me Slim Ben Achour, prévoyait « l’égalité des droits et de traitement avec les nationaux ». Or, embauchés comme contractuels, donc avec un CDI de droit privé, la plupart de ces agents, aujourd’hui à la retraite, ne relèvent pas du statut des cheminots, plus avantageux et doté d’une caisse de retraite spécifique. Accusant la SNCF de les avoir délibérément « cantonnés » aux plus bas niveaux de qualification et de salaires, ils affirment en outre que l’entreprise est allée jusqu’à poser des « barrières d’âge » pour ceux qui ont été naturalisés.
Condamnée en première instance pour « discrimination dans l’exécution du contrat de travail » et « dans les droits à la retraite » en septembre 2015, la SNCF, dont les avocats avaient pourtant insisté sur le fait que 7 000 salariés français étaient également contractuels à l’époque et que les « Chibanis » avaient connaissance des différences de réglementation à leur embauche, avait alors rappelé que « dans cette affaire, née il y a 45 ans, la SNCF a respecté les dispositions légales en vigueur ». Dispositions qui « excluent, aujourd’hui encore, l’embauche au statut SNCF de ressortissants de pays non membres de l’Union européenne ».
La « clause de nationalité » dans le collimateur
Or, ce qui est justement visé dans ce procès, c’est cette fameuse « clause de nationalité », qui réserve le régime particulier des cheminots aux ressortissants européens. Une clause dont SUD-Rail et la CGT-Cheminots, soucieux de donner satisfaction à leurs militants issus majoritairement de l’immigration, demandent bien sûr inlassablement la suppression.
Aussi, l’intervention lundi devant la cour d’appel de Me Slim Ben Achour était-elle révélatrice du véritable enjeu de cette affaire. Déclarant que « la discrimination ici ne prospère pas dans l’opacité », mais « est organisée, statutaire », « en gros assumée », celui-ci s’empressait d’ajouter que la SNCF a mis en place, ô horreur, « une sorte de préférence nationale » !