Par Alain Sanders
Le 5 septembre 1914, tout semble perdu. Les Allemands ont enfoncé les lignes françaises et rien ne pourrait arrêter leur marche sur Paris. Et puis, contre toute attente, les Français se ressaisissent et stoppent la formidable poussée ennemie.
De l’héroïsme à l’état pur. Et même un héroïsme « miraculeux ». Les Allemands, faits prisonniers après les combats du 5 au 8 septembre, en témoigneront.
Un prêtre allemand, blessé et fait prisonnier à la bataille de la Marne, est mort dans une ambulance française où avaient pris place des religieuses. Il leur dit : « Comme soldat, je devrais garder le silence. Comme prêtre, je crois devoir vous dire ce que j’ai vu. Pendant la bataille de la Marne, nous avons été surpris d’être refoulés, car nous étions légion par rapport aux Français et nous comptions bien arriver à Paris. Mais nous vîmes la Sainte Vierge, tout habillée de blanc, avec une ceinture bleue, la tête inclinée vers Paris… Elle nous tournait le dos et, de la main droite, semblait nous repousser. »
Le jour même où ce prêtre témoignait, deux officiers allemands, prisonniers comme lui, entraient dans une ambulance française de la Croix Rouge. Une infirmière, qui parlait allemand, s’occupa d’eux. Quand elle les conduisit dans une salle de repos où se trouvait une statue de Notre-Dame de Lourdes, ils s’écrièrent : « Oh ! La Vierge de la Marne ! »
Autre témoignage de l’époque, celui d’une infirmière qui soignait des blessés à Issy-les-Moulineaux, près de Paris : « C’était après la bataille de la Marne. Parmi les blessés soignés à l’ambulance d’Issy se trouvait un Allemand, très grièvement atteint et jugé perdu. Grâce aux soins qui lui furent prodigués, il vécut encore plus d’un mois. Il était catholique et témoignait de grands sentiments de foi. Les infirmiers étaient des prêtres. Il reçut les secours de la religion et ne savait comment témoigner sa gratitude. Il répétait souvent : “ Je voudrais faire quelque chose pour vous remercier. ” Vint le jour où il reçut l’extrême-onction. Il dit alors aux infirmiers : “Vous m’avez soigné avec beaucoup de charité. Je veux faire quelque chose pour vous en vous racontant ce qui n’est pas à notre avantage, mais qui vous fera plaisir. Je paierai ainsi un peu ma dette… Si j’étais au front, je serais fusillé car défense a été faite, sous peine de mort, de raconter ce que je vais vous confier. Vous avez été surpris de notre recul subit quand nous sommes arrivés aux portes de Paris. Nous n’avons pas pu aller plus loin : une Vierge… oui, une Vierge se tenait devant nous, les bras étendus, nous repoussant chaque fois que nous recevions l’ordre d’avancer. Pendant plusieurs jours, nous ne savions pas si c’était une de vos saintes nationales, Geneviève ou Jeanne d’Arc… Plus tard, nous avons compris que c’était la Sainte Vierge qui nous clouait sur place. Le 8 septembre, elle nous a repoussés avec tant de force que tous, comme un seul homme, nous nous sommes enfuis. Ce que je vous dis, vous l’entendrez sans doute répété plus tard, car nous sommes peut-être 100 000 hommes qui l’avons vue.” »