Claude Simon est un sabotier comblé. Il vient de connaître une sorte de consécration en livrant 500 paires de sabots au parc de loisirs du Puy-du-Fou (Vendée), qui vient de débuter sa saison 2016. « C’est une vraie reconnaissance de mon travail. J’estime enfin avoir obtenu une véritable crédibilité », confie Claude Simon.
Il avait bien reçu le label Entreprise du patrimoine vivant (EPV) du ministère de l’Artisanat en 2014, mais le Puy-du-Fou c’est autre chose. « J’ai été contacté par les responsables de l’animation, qui m’ont demandé un modèle spécifique. J’en ai modifié un pour que les danseurs puissent les porter sans chaussons. J’ai fabriqué 300 paires de sabots pour le spectacle et 200 pour le magasin. »
Depuis, Claude Simon propose aussi ce sabot spécial aux habitués, qui peuvent le porter avec chaussons.
Claude Simon est l’un des derniers sabotiers de l’hexagone vivant du sabot « à chausser ». Avec son épouse, Sylvie, qui travaille le cuir et les dessins sur les sabots, ils aiment accueillir les visiteurs durant l’été.
En entrant dans le magasin à l’enseigne « Au Sabot Camorien » situé route de Pluvigner, à la sortie du bourg de Camors, le visiteur découvre des montagnes de sabots à porter, de chaussons, de sabots de décoration, de cadeaux souvenirs, d’articles en cuir…
Au Sabot Camorien, c’est l’antre de Sylvie et Claude Simon, l’un des trois derniers sabotiers de Bretagne. Claude aime partager avec sa clientèle et les visiteurs de passage sa passion pour un métier que lui a appris son père.
« Il n’y a ni apprentissage, ni diplôme pour être sabotier. Je ne peux donc même pas prendre un jeune qui serait intéressé par le métier. Mon père ne voulait pas que je sois sabotier, j’ai donc dû me débrouiller !
Le sabot a longtemps eu une image négative. Actuellement, les acheteurs sont surtout des personnes qui ont de la terre, qui recherchent un chaussant confortable pour leurs pieds. Curieusement, ce sont les jeunes qui vantent désormais le confort des sabots à leurs aînés ! ».
41 sabotiers en 1921, seul aujourd’hui
Camors a compté 41 sabotiers en 1921, 77 en 1936, 72 en 1946, et 6 en 1976. Claude Simon est le dernier représentant du métier depuis de nombreuses années. « Il n’y a pas d’âge pour porter des sabots. Ce qui est sûr, c’est qu’une personne qui se sent bien dans ses sabots le fait savoir autour d’elle. Un bon sabot doit répondre simultanément à trois qualités : solidité, beauté, confort. »
Le sabot est fabriqué en bois dur, essentiellement en hêtre de la région, qui est plus lourd, plus résistant. « C’est un bois qui se tourne bien. Il est possible d’en fabriquer aussi en noyer et en sycomore, mais c’est plus rare. En Bretagne, on a de la chance, on a du bon bois, précise Claude Simon. Je n’abats pas mon bois, je me le procure auprès d’artisans forestiers du coin, qui savent bien ce que je recherche. Le m3 de hêtre pèse environ 1, 2 t. Le morceau de bois prévu pour un sabot pèse 4,6 kg, puis réduit à 1,1 kg le sabot humide, pour arriver à 600 g après une nuit de séchage ! ».
La sciure pour sécher andouilles et saumons
Le sabotier camorien se limite au hêtre, car la sciure est utilisée pour les charcuteries et saumoneries fines du secteur, qui l’utilisent pour leurs produits fumés. « Autrefois, les sabotiers de Camors étaient tenus de fumer les andouilles, saucisses, et autre charcuterie pour toute la population. J’ai séché parfois jusqu’à 100 kg simultanément ! »
Claude Simon a également su évoluer pour répondre à des demandes précises. « Pour le spectacle du Puy du Fou, les acteurs souhaitaient des sabots à porter sans chaussons. J’ai donc fait des recherches pour le confort de la voûte plantaire. J’ai réussi et inventé une voûte plantaire, tous les acteurs en sont désormais équipés. Et mes clients ont également apprécié. » Le sabot, c’est comme la coiffe bretonne : chaque terroir a ses caractéristiques. « Le bois nous dit dans quelle région est fabriqué le sabot ; le nez nous précise le terroir, et le dessin, quel sabotier l’a fait. »