L’évaluation par compétences pour diminuer les inégalités entre élèves?

 C’est ce que recommande le CNRS dans une étude, dont les résultats ont été présentés le 4 mars. Menée pour la première fois sur l’ensemble d’une académie – celle de Tours Poitiers -, l’étude s’est appuyée sur 70 établissements, dont 59 collèges, pendant toute l’année scolaire 2014-2015. Poursuivie pour 2015-2016, elle concerne cette fois 35 collèges et 5 lycées. Au total, c’est 6000 élèves qui ont été concernés par cette étude, scolarisés entre la 6ème et la 3ème. Sur toute l’année scolaire, un groupe expérimental a donc testé une nouvelle forme d’évaluation. À la place des notes, une appréciation par compétences, où le professeur peut dire si telle ou telle aptitude est «très bien acquise», «acquise», «pas acquise» ou «en cours d’acquisition». Dès lors, il ne s’agit plus de noter un devoir de français, mais de dire si l’élève est apte à écrire un texte de plusieurs lignes ou s’il respecte les techniques de grammaire, par exemple.

Pour Pascal Huguet, directeur de recherche au CNRS, ce système permettrait une évaluation plus qualitative et plus informative sur les capacités des élèves. Joint par Le Figaro, ce dernier explique que cette méthode permet également une plus grande progression pour les élèves défavorisés. «Ce moyen d’évaluation est moins stigmatisant, chaque élève peut se concentrer sur ses points faibles ou ses points forts, sans rentrer automatiquement dans une logique de comparaison récurrente et nuisible». En effet, selon les résultats de l’étude, l’évaluation par compétences associée à un usage raisonné de la note permet de «diviser par deux l’écart de performance entre élèves de familles défavorisées et favorisées».

(…) Des conclusions qui sont cependant loin de mettre tout le monde d’accord. Jean-Rémi Girard, le vice-président du syndicat enseignant SNALC-FGAF, remet en cause auprès du Figaro la méthode utilisée pour mener l’étude, qu’il qualifie de «non scientifique». «Ce n’est pas un rapport puisque l’étude n’est pas publiée. Elle n’est même pas rédigée. Le fait que l’expérimentation n’ait fonctionné que pour les mathématiques est bien la preuve que ce n’est pas une étude scientifique», relève-t-il.

(…) Mais Jean-Rémi Girard n’est pas non plus convaincu sur le fond, jugeant cette évaluation «obscure» et qu’elle «éloigne les parents de l’école». «Pour les parents de famille défavorisée, qui ne parlent pas nécessairement français, les compétences n’ont pas de sens, tandis qu’une note est claire», estime-t-il. Selon lui, cette méthode est aussi nuisible pour les élèves, bons comme mauvais. «Les bons élèves aiment les challenges, tandis que les mauvais doivent pouvoir constater une progression et doivent savoir où ils se situent dans la classe», assène le syndicaliste. Selon une des collègues de Jean-Rémi Girard, qui a participé à l’expérimentation, ce système aurait surtout tendance à «démotiver» les élèves «moyens», qui ne voient pas dans l’évaluation par compétences une marge de progression concrète.

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