Par Alain Sanders
Journaliste chevronné, diplômé de l’université de Californie, Gérald Olivier assure, notamment, la très intéressante chronique « Trans-Amérique Express » sur Atlantico.fr.
En publiant ce Kennedy, il n’est pas loin de l’hagiographie. Comme le suggère d’ailleurs le sous-titre de l’ouvrage : « Le temps de l’Amérique. Comment John et Jackie ont changé le monde. » Alors, un peu partial, Gérald Olivier ? Yes, sir ! Mais, étant souvent un peu de mauvaise foi moi-même – quand on aime, on est forcément injuste – j’aurais mauvaise grâce à le lui reprocher…
D’autant que l’auteur ne manque pas d’arguments pour nous faire partager son enthousiasme à l’égard d’un couple qui, couple de façade pourtant, sut séduire par son style, sa jeunesse, son apparente joie de vivre. Il serait d’ailleurs honnête de dire qu’ils séduisirent plus à l’étranger (c’est un peu comparable au phénomène Obama) qu’aux Etats-Unis où, contrairement à ce qu’on croit de notre côté de l’Atlantique, on a les pieds bien ancrés dans la glèbe.
Que Kennedy ait été, après son assassinat le 2 novembre 1963, regretté par des gens comme Tito, Castro, Khrouchtchev, Sékou Touré, Sihanouk, ne plaide pas forcément en sa faveur… Mais pour Gérald Olivier, aucun doute : « L’Amérique de 1963 allait beaucoup mieux que celle de 1960. Kennedy avait relancé l’économie, proposé une baisse d’impôts historique, soumis au Congrès une loi magistrale pour combler le fossé entre Blancs et Noirs, résolu plusieurs crises internationales majeures, repoussé le spectre d’une guerre nucléaire et contribué à la paix. » Bref, il n’a pas réussi à programmer l’extinction du paupérisme après 6 heures du soir, mais c’est parce que le temps lui a manqué…
Reste qu’il y a des choses que l’on a pu aimer chez Kennedy. Ses origines irlandaises. Sa détermination sans faille face aux Soviétiques installés avec leurs fusées à Cuba. Même si on oublie souvent de dire que, pour obtenir le recul des Soviétiques, il avait conclu un accord secret, acceptant de retirer les missiles américains déployés en Turquie et en Italie… Son voyage à Berlin encerclée et son inoubliable : « Ich bin ein Berliner ! »
Groupie des Kennedy, Gérald Olivier n’en cèle pas pour autant les infidélités à répétition de JFK, et des pratiques sexuelles qui relevaient d’ailleurs plus de Bugs Bunny que d’un savant donjuanisme.
Même si ce n’est pas le propos de son livre, Gérald Olivier consacre un chapitre de son livre – et comment faire autrement ? – à la tragédie de Dallas. En rappelant que, cinquante ans après les faits, les théories complotistes continuent de fleurir. Même si aucune d’entre elles n’a jamais trouvé le début d’un semblant de justification.
Auteur de La Face cachée du clan Kennedy (publié aux Etats-Unis en 1977, il vient d’être réédité en France aux éditions Archipoche), Seymour Hersh donne une des clefs de la légende Kennedy : « Qu’on apprécie ou non sa politique, on se sentait attiré par lui. Il était bon d’avoir un jeune président qui semblait vigoureux, avec sa si jolie famille. Il a très bien su utiliser et manipuler les médias. »
Jeune, en effet. Il avait 46 ans dans un monde de « vieux » : De Gaulle, 71 ans ; Adenauer, 85 ans ; Khrouchtchev et Macmillan, 69 ans ; etc. Sa mort tragique – et sa relative jeunesse – ont contribué à en faire un héros romantique pour jeunes filles nubiles et ménagères de plus de cinquante ans…
• Editions Picollec.