Étienne Chouard, devenu depuis le 17 novembre une star au sein des gilets Jaunes, vient de publier, chez Max Milo, un petit ouvrage intitulé Notre cause commune dans lequel il a résumé ses positions concernant le tirage au sort et le référendum d’initiative citoyenne.
Le mouvement des gilets jaunes a deux origines : d’une part, l’appauvrissement ou la stagnation des revenus des classes les moins favorisées et désormais de la classe moyenne que les Français comparent à l’enrichissement indécent des 1 % et, plus encore, des 0,1 %, les plus riches ; d’autre part, le fait que la classe politique ne tient jamais compte des revendications des électeurs. L’attitude d’Emmanuel Macron qui refuse d’aborder la question de l’immigration et de réfléchir à l’introduction du référendum d’initiative citoyenne illustre parfaitement celle d’une classe politique arrogante et prétentieuse qui a le sentiment de détenir la vérité.
Le Président a déclaré, au journal suisse Le Matin du 1er février, que le système politique suisse n’est pas transposable en France, sans apporter la moindre démonstration de ce qu’il avançait. Sur ce sujet, le Président et le Premier ministre disent n’importe quoi et veulent éviter à tout prix une évolution que l’oligarchie rejette totalement.
Il y a, en France, 577 députés, 348 sénateurs, une trentaine de ministres et un président de la République, soit moins de mille personnes dans un pays qui compte environ 47 millions d’adultes. Comment peut-on croire qu’il y aurait plus d’intelligence au sein de ce petit millier de personnes avides de pouvoir que parmi les 47 autres millions ? Aristote et Machiavel pensaient, au contraire, qu’il y a plus d’intelligence au sein d’une population prise dans son ensemble que dans une minorité de gens savants, ce que ne sont que très rarement nos élus.
Les politiciens et les journalistes se posent en défenseurs de la « démocratie représentative » ; savent-ils que Sieyès, qui pensa et imposa le système représentatif en France, considérait que ce dernier était fondamentalement différent de la démocratie ? Notre système est représentatif, il n’est pas démocratique. Les Athéniens de l’Antiquité avaient clairement compris que l’élection n’est pas démocratique, d’où leur préférence pour le tirage au sort de la plupart des magistrats (les stratèges étaient, eux, élus parmi des spécialistes de la guerre), ce qui était le cas également dans les républiques de Florence et de Venise.
D’où l’idée intéressante d’Étienne Chouard qui suggère la création d’une chambre de contrôle de l’activité des législateurs, laquelle pourrait remplacer le Sénat ; les membres de cette chambre seraient tirés au sort et leur mandat serait de courte durée. Dans une telle chambre, la population serait représentée de manière assez fidèle et la rotation rapide de ses membres limiterait l’influence des lobbys. La crainte d’une invalidation des lois contraindrait les parlementaires à écouter attentivement le peuple, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.
On pourrait imaginer, d’ailleurs – Chouard ne l’évoque pas dans son livre, mais je me permets de la suggérer -, la création d’un contingent de grands électeurs tirés au sort (50.000 pour une année) qui auraient l’obligation de voter lors des référendums concernant les lois ordinaires (pour les lois constitutionnelles et les traités, il faudrait peut-être maintenir un scrutin général). Ce contingent serait un peuple français en réduction (500 tirés au sort en moyenne par département, proportionnellement à la population de chacun d’entre eux). Ce dispositif permettrait d’éviter la lassitude des électeurs et des taux de participation de 100 %. Il permettrait aussi d’éviter l’utilisation de l’initiative populaire par des lobbys, comme cela se fait aux USA, et l’influence de ces derniers sur les électeurs (interdiction d’approcher de quelque manière que ce soit le contingent de grands électeurs).
L’initiative populaire, l’initiative de la minorité parlementaire et le tirage au sort, trois solutions pour en finir avec la crise du système représentatif.