Un tourisme urbain et éthique commence à prendre forme dans les quartiers populaires de Paris, loin de l’image polémique des “no-go zones” évoquée par Fox News après les attentats perpétrés à l’encontre de Charlie Hebdo en janvier. Si le Louvre, la Tour Eiffel et le Château de Versailles ne devraient pas être déboulonnés de sitôt de leur statut de monuments les plus visités de France, un tourisme décalé, urbain et éthique, commence à se développer dans les quartiers populaires à Paris, tels que la Goutte d’or ou Château-Rouge, loin de l’image polémique des “no-go zones” évoquée par Fox News . Après le reportage de Fox News diffusé dans la foulée des attentats de janvier, et évoquant des zones de non-droit où s’appliquerait la charia, “des amis américains vivant à Paris m’ont raconté avoir reçu des coups de fil affolés de leurs proches dans l’Ohio qui leur demandaient s’ils étaient en sécurité”, raconte Lionel Kaplan, dirigeant de l’agence Mediatrium.
Pour répondre à “l’image erronée et injuste” véhiculée par ce reportage, il a eu l’idée de lancer un site, nogozones.fr , qui propose aux touristes américains de les mettre en relation avec des riverains pour “découvrir le Paris dangereux” — un terme contrastant volontairement avec les photos idylliques postées en illustration.
Marché de Château-Rouge
Le site compte ouvrir à la fin du mois. Mais le tourisme urbain existe déjà dans ces quartiers populaires, où des associations travaillent à expliquer rues et boutiques au visiteur non initié. “L’idée c’est de découvrir de l’intérieur, pour aller à la rencontre du patrimoine culturel, alimentaire ou vestimentaire”, explique Stefan Buljat, responsable de l’agence de voyages éthiques Bastina. Les clients de l’agence habitent pour beaucoup en région parisienne, “mais ils hésitent à visiter seuls parce qu’ils n’ont pas les codes. Avec nous ils osent, et ensuite reviennent, et cela crée du lien social”, explique Stefan Buljat. Mais l’intérêt dépasse les frontières, avec 20% d’étrangers dans la clientèle: “Il y a peu, nous avons organisé un circuit pour des étudiants américains, autour de la sape africaine”. Car le quartier regorge de vendeurs de wax, ce tissu traditionnel prisé des élégantes africaines.
“Tourisme de niche”
Au-delà de l’aspect folklorique, le circuit permet aussi de retracer l’histoire complexe de ce quartier, avec un arrêt dans la rue Myrha, objet d’une violente polémique en 2010 lorsque Marine Le Pen avait parlé d'”occupation” à propos des prières de rue.D’autres organismes que Bastina investissent timidement ce créneau.
“Cela reste un tourisme de niche”, note François Navarro, directeur du comité régional du tourisme de Paris Ile-de-France. “Mais il se développe, avec une demande des touristes de vivre le vrai Paris des Parisiens”. Reste maintenant à voir si ce segment va bénéficier du malheureux “effet Fox News”.