La sténographie (du grec stenos, serré et graphê, écriture), est l’art de se servir de signes conventionnels pour écrire d’une manière aussi rapide que la parole ». L’histoire de la sténographie est ancienne : un système d’écriture abrégée était déjà utilisé sur les tablettes antiques puis dans les manuscrits médiévaux. Mais c’est au XVIIIe siècle qu’on essaie vraiment de mettre au point une méthode rapide d’écriture. Après plusieurs essais peu concluants, le système Prévost s’impose en 1826 : sa caractéristique « est de ne pas exprimer les voyelles médiales, mais seulement les voyelles initiales et finales qui s’entendent, et de représenter toujours le même son par le même signe » (1). Amélioré en 1878 par A. Delaunay, le système prend le nom de Prévost-Delaunay et se veut « la perfection dans la vitesse » (1). Un autre système, celui de l’abbé Duployé, est présenté à l’exposition universelle de 1867. Le système Prévost-Delaunay sera surtout utilisé dans le nord de la France, le système Duployé dans le sud.
A partir des années 1880, la sténographie est pratiquée par une élite d’amateurs éclairés qui l’utilisent à des fins personnelles. Les premiers vrais utilisateurs professionnels se rencontrent dans les milieux journalistiques, puis dans le monde judiciaire. Des associations se créent, parfois concurrentes selon le système préconisé.
C’est à la fin du XIXe siècle que les sténographes entrent dans les bureaux. Leurs compétences professionnelles sont reconnues : ces hommes sont en fait des secrétaires et bénéficient de la confiance du chef d’entreprise. Au tournant du siècle, le métier cesse peu à peu d’être exclusivement masculin. Les sténographes sont les premiers à se rendre compte de l’utilité de la machine à écrire pour compléter leur propre activité. D’ailleurs, ils remportent souvent les championnats de dactylographie. En 1889 est créé le Syndicat général des sténographes et dactylographes qui regroupe les membres des deux professions.
Une invention vient modifier sensiblement le travail des sténographes : la machine à sténographier. De conception et de fabrication françaises, le sténophile Bivort (1904) machine à sténographieret le sténotype Grandjean (1910) sont les deux modèles les plus utilisés. Ces machines permettent une écriture plus rapide, plus aisément lisible que la sténographie manuscrite dont la prise de notes est souvent très personnelle.
L’utilisation de ces machines nécessite apprentissage et entraînement permanent. Les sténotypistes se spécialisent donc dans la prise de notes, laissant à d’autres la transcription à la machine à écrire.
Vers 1910, un autre concurrent fait son apparition : la machine à dicter. La voici, présentée par la revue Mon Bureau (2) : « inutile de s’occuper de la vitesse, chacun peut enregistrer, comme il a l’habitude de parler. dictaphone. L’utilisation du dictaphone provoque une crise dans la profession de sténo-dactylographe : dans les plus grandes entreprises, en particulier aux Etats-Unis, dictaphone et « pools » de dactylos se complètent et suffisent à assurer les travaux de correspondance commerciale. La sténographie semble menacée.
L’usage de la sténographie, et son enseignement, ont pratiquement disparu actuellement. Toutefois la sténotypie se perpétue dès qu’il s’agit de rendre compte officiellement de débats et discussions, dans des congrès, les assemblées territoriales ou nationales. La machine elle-même, dont la forme et l’aspect n’ont pas varié depuis le début du XXe siècle, est maintenant dotée des derniers progrès techniques : elle peut se connecter à un micro-ordinateur qui décode instantanément la « prise » de notes et la transforme en mots directement exploitables par traitement de texte. La phase de transcription par la sténotypiste est ainsi supprimée.