La France est un drôle de pays. En 2016, après que le Président Hollande avait invité les Français à pavoiser leur domicile afin de rendre hommage aux victimes des attentats islamistes du 13 novembre, des locataires niçois avaient reçu une lettre du syndic de copropriété les enjoignant de retirer le drapeau tricolore qu’ils avaient installé dans leur jardin : « Nous tenions à vous remercier de votre patriotisme mais sachant que les activités sportives estivales sont terminées, nous vous serions reconnaissants de bien vouloir le déposer afin d’éviter tout débordement. » Le patriotisme, c’est bien devant la télé ou au stade, mais faudrait voir à pas pousser le bouchon trop loin. Un syndic qui comptait sur la « collaboration » de ce couple de retraités. Rassurez-vous, cette « collaboration » n’allait pas jusqu’à demander de remplacer notre drapeau national par un autre. La prochaine fois, peut-être. Face à la levée de boucliers, la société gestionnaire s’était désolidarisée du syndic.
En 2018, dans la commune de Sainte-Terre en Gironde, un village de 2.000 habitants, le maire socialiste avait voulu interdire à l’un de ses administrés de pavoiser sa maison avec le drapeau tricolore frappé de la croix de Lorraine. Argument du maire : « Avec ce grand drapeau, on peut penser qu’il veut signifier “La France aux Français”… » Et c’est grave, ça, Monsieur le Maire ? Apparemment, oui, quand on lit l’explication de l’édile : « Ici, ça choque, pas forcément que les immigrés. » Dans ce cas, effectivement. Mais la chose était encore plus grave qu’on pouvait l’imaginer, tout du moins dans la tête du maire : « Si chacun s’amuse à mettre un drapeau de sa couleur politique, de son appartenance religieuse, de son appartenance à un pays, etc., c’est ubuesque, on n’en sort plus. Qu’est-ce que je dois faire si, à côté, quelqu’un met un drapeau islamiste ? » Vu comme ça, effectivement.
Alors, au nom du parallélisme des formes, de la sacro-sainte égalité des droits, si nos Niçois ont pu continuer à hisser les couleurs bleu blanc rouge dans leur jardin, si notre Sainte-Terrois a eu, finalement, gain de cause puisque la sous-préfecture avait expliqué qu’il n’y avait pas de règles opposables pour interdire ce pavoisement quelque peu gaulliste, pourquoi interdire ces déferlantes de drapeaux algériens à l’occasion des matchs de foot qui voient l’équipe d’Algérie jouer ? Pourquoi, d’ailleurs, ne pas carrément pavoiser nos édifices officiels avec le drapeau vert et blanc frappé du croissant et de l’étoile rouges lors de ces rencontres sportives ? Il se trouverait bien quelques belles âmes pour expliquer que ce serait une belle preuve de vivre ensemble mais aussi, quelque part, une façon d’éviter les éventuels « débordements ». C’est vrai, ça. Alors, pourquoi pas ?
Parce qu’il paraît qu’on est en France.
Georges Michel – Boulevard Voltaire