« Et si on créait un marché de l’immigration ? » Tel est le titre d’une tribune publiée dans Les Echos sous la plume de Gaspard Koenig, « philosophe et président du think tank GénérationLibre ». Koenig raconte que, la semaine dernière, il s’est rendu au Musée de l’immigration où était décerné le prix littéraire de la Porte Dorée « qui récompense des ouvrages sur l’exil ». Là, il a constaté que, « parmi ce public choisi, chacun pense que l’immigration est un cadeau des Dieux – moi le premier, qui vis entre deux pays et suis marié avec un troisième ». Mais voilà, les peuples « les peuples ne l’entendent pas de cette oreille. Que faire ? « Plutôt que de s’en tenir à la rengaine de l’amour de l’Autre, il faut […] combattre le non politiquement correct des nationalistes par un non politiquement correct de l’ouverture. » Et la bonne idée existe. Il l’a trouvée dans un livre. Il explique. On s’assoit avant de lire encore que le risque existe de tomber de sa chaise…
« C’est exactement ce qu’entreprend Emmanuelle Auriol, économiste de la Toulouse School of Economics, dans un livre courageux : Pour en finir avec les mafias (Armand Colin). Dans la lignée de Jean Tirole, qui prend toujours soin de laisser la morale en dehors des réflexions de politique publique, Emmanuelle Auriol propose de légaliser ce qui fait l’objet des trafics illégaux, à commencer par le sexe et la drogue. S’agissant de l’immigration économique (bien distincte du droit d’asile, sacré et universel), sa solution est tout aussi simple et rationnelle : la vente des visas. “Puisque les politiques répressives de contrôle des frontières et d’identités ne sont pas efficaces contre les passeurs, écrit-elle, une idée naturelle est d’utiliser des instruments tels que les prix et le marché pour les éliminer.“
« A l’immigration clandestine se substituerait ainsi une immigration légale et payante, qui aurait le double avantage d’évincer les organisations criminelles, et de renflouer les caisses de l’Etat pour mieux organiser l’accueil ou lutter contre le travail au noir. Des négociations avec les entreprises et les partenaires sociaux permettraient d’identifier les secteurs les plus demandeurs, tandis que des accords bilatéraux avec les pays d’origine faciliteraient les processus, gérés par des agences de placement privées (l’Espagne s’est déjà engagée dans cette voie).
« Il est assez probable que mes nouveaux amis du prix littéraire de la Porte Dorée s’étrangleraient d’indignation à l’idée de vendre des visas, et m’accableraient de sermons sur le thème de la “marchandisation“. Mais vaut-il mieux laisser un Erythréen entre les mains de mafias sans scrupules, ou lui permettre d’acheter sa nouvelle vie à un prix raisonnable, et de prendre tranquillement l’avion pour l’Europe ? Si le marché est un instrument de gestion de la rareté, pourquoi ne pas le mettre au service d’une noble cause ? Pour gagner la bataille face aux populismes, il est temps que les bien pensants se mettent à penser bien ! »
Si le Grand Remplacement peut rapporter encore plus, pourquoi s’en priver.