Après un portrait très négatif, et pour tout dire d’une parfaite malhonnêteté intellectuelle, de Marion Maréchal-Le Pen la semaine dernière, France 2 nous a livré lundi 13 avril au soir celui de Manuel Valls, plus nuancé, dirons-nous. Comme quoi, le service public est largement capable d’instruire à charge et à décharge. L’auteur de ce portrait : Franz-Olivier Giesbert, ce qui explique les petites touches acidulées du tableau, histoire de ne pas passer pour un peintre pompier au service des puissants.
L’on ne nous a pas épargné l’épisode migratoire, à cause de Franco, bien évidemment. Pas en 1939, mais dans les années 50. Pas dans un convoi pour rejoindre les sinistres camps du sud de la France mais plus prosaïquement pour aller vivre à Paris dans le Marais. Certes, le reportage nous fait presque pleurer car on devine qu’en ce début des années 60, il n’y avait pas de salle de bains chez les Valls. Il est vrai que c’était le cas pour 90 % des Français à l’époque…
La maman, comme il se doit, fut appelée à la rescousse pour dresser ce portrait en pied de notre conquistador de pacotille. Figurez-vous que, déjà tout petit, il rangeait tout comme il faut, bien parallèle, ses petits souliers au pied du lit. Tout petit, donc, un petit homme d’ordre : ça, même si c’est un peu tic et toc, ça plaît bien au gens, surtout à droite. On l’a compris, la maman, elle l’aime bien et elle l’admire, son petit. Normal. Imaginez le contraire. « Mon fils, il n’est jamais allé au-delà de sa licence d’histoire et n’a jamais exercé un vrai métier, vu qu’il s’est toujours débrouillé pour vivre [bien] de la politique… » Madame, on va la refaire, s’il vous plaît, faut pas dire comme cela, Madame…
Après la maman, le père spirituel, Michel Rocard, très tic et toc aussi. Il l’aime bien, son Manuel, notre Michel, et c’est vrai qu’à un moment, il nous a presque versé sa larme. Que nous dit-il sur celui qui devait lui faire le café et ses photocopies au ministère du Plan et de l’Aménagement du territoire en ce début des années 80 ? En gros, je cite de mémoire, que c’était un bon petit gars astucieux à qui on n’avait pas à répéter deux fois la même chose ! On dirait l’éloge d’un artisan-patron vantant les mérites de son ancien arpète qui aurait réussi à créer sa boîte. Rocard, on ne le changera pas, et c’est tant mieux : ce n’est pas le genre à vous inventer une légende des siècles pour rendre service à un copain.
Heureusement que l’inénarrable Alain Bauer était là pour donner une touche légendaire à ce tableau. Il paraît que Manuel, alors qu’il était étudiant à Tolbiac, avait déjà l’ambition d’être président de la République. Si vous ne trouvez pas de bohémienne à côté de chez vous pour vous lire l’avenir, consultez Alain Bauer, il vous fera ça très bien.
Tout en clair-obscur, ce portrait laisse dans l’ombre certains aspects de la vie – privée comme publique – de l’homme. On aurait aimé, par exemple, un petit détour par son avant-dernière compagne, urbaniste bien connue du côté d’Évry… Tant pis. Ou bien, encore, une évocation de ses souvenirs de guerre urbaine. Pas la guerre menée contre les voyous, non, mais celle faite en 2013 à ceux qui défendaient la loi naturelle. Dommage. On ne peut pas tout dire en une heure et demie, que voulez-vous !