La CGT l’ayant emporté sur les autres syndicats, c’est le 22 mars que les usagers de la SNCF seront pris en otages. Mais, bien avant la remise du rapport Spinetta, la date du 22 mars avait été choisie par la centrale communiste pour sa « grande journée d’action » dans la fonction publique. Cette date ne doit rien au hasard. Car c’est un 22 mars que, un an après des législatives difficilement gagnées par les gaullistes, débuta réellement le « printemps de mai » 68. Il n’est donc nullement exclu que, cinquante ans plus tard, la gauche extrême, calée sur la CGT et le syndicat SUD, veuille démontrer au Jupiter de l’Elysée que la roche Tarpéienne est proche du Capitole.
Pas de « printemps » pour la cause des femmes
Les étudiants de Nanterre en réunion politique : ceux qui veulent aller dans le dortoir des filles, levez le doigt !
A l’heure où, sous l’impulsion des sapho-féministes bien décidées à obtenir l’extinction de l’espèce humaine – sauf, bien sûr, grâce à la procréation médicale assistée ou à la gestation pour autrui –, la priorité est la lutte contre les harceleurs de femmes ou à ceux qui, pour parler comme mamie Deneuve, les importunent sans leur consentement, combien apparaît pourtant « vieux monde » le détonateur du 22 mars 1968 ! A savoir, pour les plus excités des étudiants de la nouvelle université de Nanterre, le libre accès aux bâtiments des filles, qui leur étaient interdits. Est-il besoin de préciser qu’avant d’exiger ce droit de passage, voire de cuissage si l’on en juge par ce qui passa ensuite à la direction de l’UNEF, les révoltés n’avaient pas jugé utile de demander le consentement, allant de soi selon eux, des demoiselles ?
Ayant mis son veto, le recteur Grappin fut traité de « nazi » bien qu’ancien résistant et impeccable homme de gauche, et ridiculisé par une méchante chanson, « La Grappignole » où, dans un mélange du « Ça ira » et de « La Carmagnole », les autres mandarins de Nanterre n’étaient d’ailleurs pas épargnés. Tels les sociologues Alain Touraine (père de Marisol, futur ministre de Hollande), qu’il fallait « se payer », « Et si on s’le paie pas / Sa gueule on lui cass’ra », ou Jean Maisonneuve qui « écrit dans L’Aurore / C’n’est pas un singe, c’est un porc ».
Enfantillages ? Sans doute. Mais, cornaqué par des situationnistes, des anarchistes et des « spontanéistes » plus tard connus comme « mao-spontex » pour leur inféodation au Grand Timonier chinois, le Mouvement du 22 mars qui alterna bientôt occupations sauvages de bâtiments publics et assemblées générales « ouvertes au peuple » annonçait l’occupation antimilitariste du plateau du Larzac de 1971 à 1981 et les ZAD ultérieures, de Sivens à Notre-Dame-des-Landes où l’autorité de l’Etat fut régulièrement mise en échec.
Surtout, entretenant le brasier grâce à une habile agit-prop immédiatement relayée par les radios soucieuses de faire de l’audience (« La France s’ennuie », avait titré Pierre Viansson-Ponté dans Le Monde, et les journalistes s’ennuyaient aussi), il fut le creuset des « événements » de mai, qui s’éternisèrent d’ailleurs jusqu’en juin. Avec toujours comme figure de proue un certain Daniel Cohn-Bendit. Lequel, né en France de parents allemands, avait opté pour la nationalité allemande afin d’échapper au service militaire.
« Une révolution juive » ?
Comme Dany le Rouge, les conjurés du 22 mars étaient de grands lecteurs du philosophe marxiste italien Gramsci et du Germano-judéo-Américain Marcuse, mais aussi des rapports Kinsey (dus à un Américain méthodiste et homosexuel, biologiste reconverti sexologue bien qu’il fût lui-même un aliéné mental s’enfonçant des brosses à dents dans l’urètre pour se punir de ses déviances, et dont les statistiques extravagantes sur les pratiques sexuelles selon lui en usage outre-Atlantique ont depuis été battues en brèche) et de la pseudo-étude, qui venait d’être éditée par Laffont, due à d’autres sexologues yankees. William Masters et Virginia Eshelman Johnson préconisaient d’utiliser son sexe « aussi naturellement qu’un couteau et une fourchette » et conseillaient d’initier les enfants dès leur plus jeune âge aux jeux de l’amour afin d’en faire des « êtres libérés ». Un conseil que Cohn-Bendit, devenu éducateur à Francfort dans une crèche autogérée, se vantait dans sa bio intitulée Le Grand Bazar (éd. Belfond, 1975) d’avoir suivi à la lettre.
Inutile de dire que, parti sur de telles bases, le mouvement de mai fut un vaste défouloir.
Certes, sur le plan idéologique et dans l’organisation des désordres (dont, soit dit en passant, l’addition fut très lourde du point de vue écologique, entre les centaines de voitures brûlées et les dizaines d’arbres abattus pour constituer des barricades), c’est Alain Krivine qui tenait la barre avec sa Ligue communiste révolutionnaire et « les 18 leaders juifs de Mai 68 » énumérés par le site communautaire Yeroushalmi.com et dont Alain Geismar, Alain Finkielkraut, André Glücksmann, Olivier Castro et Bernard Kouchner, sans oublier bien sûr Cohn-Bendit, sont les plus connus. Une prédominance déjà signalée par Le Monde en mai 1988 (« Le mouvement de mai 68, révolution juive ? ») et par l’historien israélien Yair Auron dans son étude Les Juifs d’extrême gauche en mai 68publiée par Albin Michel.
Logorrhée, agoras… et lupanars. Et demain ?
Mais, autant que des agoras qui, avec leur désolante (et parfois désopilante) logorrhée, annonçaient les « Nuits debout » de la place de la République en 2016, la Sorbonne et le théâtre de l’Odéon « occupés », où le crachoir était exclusivement tenu par des hommes – comme je m’en étais à l’époque étonnée dans Rivarol –, furent de gigantesques baisodromes. Militantes et visiteuses se contentaient en effet d’assurer la cantine et le repos du guerrier. Exclusivement blanc, même les incontrôlables « Katangais » de la Sorbonne, traîne-patins alcoolisés se prétendant anciens mercenaires – ce qui eût horrifié mon ami le major Müller, chef des prétoriens de Moïse Tschombé.
Ayant alors suivi maints cortèges, heurts avec les « CRS-SS » et assemblées générales, je ne me souviens pas y avoir vu le moindre allogène. Qu’en serait-il cinquante ans plus tard, dès lors que, de l’aveu même de la Préfecture après la mort par arme blanche d’un lycéen le 30 janvier 2017, la capitale compte une quarantaine de bandes ethniques et que les rames du RER B déversent constamment les jeunes (et les dealers) du « 9-3 » ?
Bien qu’un Daniel Cohn-Bendit rangé des voitures (cramées) mais pas des honneurs, puisqu’il a été fait successivement docteur honoris causa puis membre du conseil d’administration de l’université de Nanterre et député européen (cependant que son pote Geismar est aujourd’hui inspecteur général honoraire de l’Education nationale), soit devenu l’un des plus chauds soutiens d’Emmanuel Macron, on ignore toujours si le président va commémorer ce maudit printemps. En veut-il aux Enragés d’avoir daubé sur le philosophe Paul Ricœur, dont il se prétend le disciple et le collaborateur, et que « La Grappignole » accusait de ne pas « cracher sur les bonnes sœurs », ou estime-t-il plus sage de ne pas encourager le ventre toujours fécond de l’hystérie protestataire ? Car, cette fois, aux étudiants ratés, ou privés de débouchés, risqueraient de se joindre la masse des « gamins des cités » friands de sensations fortes et celle des migrants, tentés de régler leurs comptes avec les forces de l’ordre. Sans parler des No Borders et autres Black Blockers, dont on connaît la force de frappe.
Camille Galic – Présent