Il faut accepter l’évidence : de Najat Vallaud-Belkacem à Emmanuelle Cosse, nos ministres explorent le champ lexical de la chose… C’est la voix de l’inconscient, diront les psys. À moins que ce ne soit désormais une question aussi récurrente que centrale en Conseil des ministres : jusqu’à quel point le gouvernement Hollande est-il dans la merde ?
Notez, vu comme ils y pataugent tous, on comprend que ça les obsède.
Le mot ou ses attributs deviennent en effet très présents dans le débat public, au point qu’on se demande s’il ne s’agit pas d’une nouvelle stratégie des fameux communicants : c’est le ministre de l’Éducation qui s’emporte sur RTL et dénonce « des bruits de chiottes », puis le nouveau ministre du Logement, Emmanuelle Cosse, qui s’énerve au « Petit Journal » et balance : « Et merde, je ne cumule pas ! » C’est pour faire jeune, peut-être, histoire de désamorcer le prurit estudiantin qui monte en ce début de printemps ?
Il faut les comprendre aussi, ces ministres fraîchement nommés, surtout Emmanuelle Cosse. Quand on a passé comme elle des mois à railler, ricaner, moquer, gloser, chambrer le président de la République, son gouvernement et son (in)action pour finalement aller à la gamelle toute honte bue, c’est difficile, forcément. Ça vous oblige à des contorsions et des retournements qui ne sont guère aisés, même avec un physique d’ablette. Résultat : il suffit qu’apparaisse un micro tendu par un petit malin pour qu’on pète les plombs.
Interrogée par « Le Petit Journal » sur la compatibilité de son mandat de conseillère régionale et ses nouvelles fonctions ministérielles, Mme Cosse s’est méchamment agacée : « Aujourd’hui, je suis conseillère régionale d’opposition, je dois venir défendre mes dossiers en séance une fois par mois. Et merde, à la fin, je ne cumule pas ! » Non, elle empile juste. Elle additionne, ce qui n’a rien à voir. Rien à voir, surtout, avec la 48e promesse de campagne hollandaise ainsi claironnée lors du débat d’entre-deux-tours : « Moi, président de la République, les ministres ne pourraient pas cumuler leurs fonctions avec un mandat local parce que je considère qu’ils devraient se consacrer pleinement à leur tâche. » Une promesse qu’Emmanuelle Cosse a retranscrite à sa sauce, ajoutant au mandat l’adjectif « exécutif ». Or, « un mandat d’élu d’opposition n’est pas une fonction exécutive », dit-elle. Ah ?
Toutefois, sentant bien que celle-ci est un peu chancelante, elle table sur une autre ligne de défense, d’une solidité à toute épreuve celle-là. Et l’on peut croire que, là-dessus, elle recueillera le soutien de toute la classe politique. Furibarde, Emmanuelle Cosse a en effet conclu l’entretien par cette sentence prémonitoire : « Vous contribuez à dénigrer le travail des élus locaux. Le Front national sera très content de tout ça. »
Tenez-vous-le pour dit, Mesdames et Messieurs les journalistes : si vous dénoncez les turpitudes, les petits arrangements et les grosses magouilles, vous allez faire plaisir au Front national. Et ça, c’est pire que toutes les entorses aux règlements et à la loi !