L’ahurissant impérialisme des Etats-Unis en Europe : sanctions, pénalités, tribunaux, arrestations, données privées !
Cet accord euraméricain porte sur le transfert de données personnelles « entre les deux continents » (comprendre : de l’Europe vers les Etats-Unis). Il s’intitule Privacy Shield : « bouclier de la vie privée ». Les gens avertis doutent du bien-fondé de ce nom, pour deux raisons :
1 En novembre 2015, Privacy Shield a été improvisé pour rassurer les Européens inquiets de l’accord précédent, qui s’intitulait (par antiphrase) Safe Harbor : «port fiable » … L’accord Safe Harbor avait été invalidé en octobre par la Cour de justice de l’UE : c’est dire que sa vraie nature ne pouvait être dissimulée.
2 La nature (libérale) de Safe Harbor est aussi celle de Privacy Shield. Aux termes de ce document, la protection « adéquate » des données européennes ne sera pas garantie par la loi US, mais seulement par… la bonne volonté des sociétés privées américaines. Si les citoyens des pays de l’UE* constatent l’utilisation abusive de leurs données par des sociétés américaines, ils ne pourront protester qu’auprès de l’agence** de protection des données de leur pays ; celle-ci « transmettra la plainte » à Washington. Absence de suites prévisible… En cas d’intrusion (visible) des services US dans les données d’un « « citoyen européen », ce « dossier sensible » sera transmis à un « médiateur » chargé de le « traiter »…
Le flou est donc total.
Comme l’a constaté l’eurodéputé Vert franco-allemand Jan Philipp Albrecht, juriste spécialiste du numérique et rapporteur du projet de règlement européen sur la protection des données, « la Commission nous ressert un vieux plat réchauffé » : les progrès par rapport à l’accord Safe Harbor sont quasi-inexistants, Washington n’a pas pris d’engagements, et le « médiateur » à créer ne sera pas doté de pouvoirs concrets. Albrecht appelle les agences européennes à rejeter Privacy Shield. Faute de quoi une nouvelle plainte sera déposée devant la Cour de justice de l’Union européenne…
Privacy Shield est évidemment « soutenu » par l’eurogroupe parlementaire PPE (centre-droit), dont font partie Les Républicains français.
Inutile de préciser que cet accord satisfait aussi la secrétaire américaine au Commerce, Penny Pritzker : « ça va aider à la croissance de l’économie numérique », déclare-t-elle. Que demander de plus ?
Patrice de Plunkett – Polémia
Notes :
(*) abusivement qualifiés de citoyens « européens » par Privacy Shield.
(**) américanisme : qualifier d’agences (terme du privé) des organismes censés remplir des tâches d’Etat.