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Didier Paillard, maire communiste de la ville de Saint-Denis (93), a pour projet de reconstruire la tour Nord de la basilique de Saint-Denis. Sur le papier, l’idée peut paraître séduisante. En effet, l’édifice est orphelin de sa tour Nord, qui était surmontée d’une flèche, construite au XIIe siècle par les moines bâtisseurs pour concurrencer Notre-Dame de Paris. La foudre, puis une tornade, ont déstabilisé les deux éléments, lesquels ont été démontés en 1846. Un projet de reconstruction avait même été envisagé par l’architecte Viollet-le-Duc, pour être abandonné par la suite, jusqu’à aujourd’hui.
Reconstruire la tour Nord, et rendre à la basilique Saint-Denis une hauteur largement supérieure à celle de Notre-dame de Paris, est un projet romantique qui séduira probablement les amoureux de notre histoire ; mais est-ce réalisable, ou tout simplement souhaitable ? Deux camps s’opposent.
Pour le comité de parrainage, présidé par l’académicien Érik Orsenna, cela ne fait aucun doute. Didier Paillard déclarait récemment dans les colonnes du Figaro : « Cette basilique fait partie de notre histoire. Elle est inscrite dans les gènes d’une ville qui s’est édifiée autour d’elle. C’est l’une de nos grandes fiertés, et il est temps de lui redonner le visage qu’elle a eu pendant des siècles. » On ne peut pas lui donner tort : la basilique Saint-Denis abrite la nécropole des rois de France. À ce titre, ce monument revêt une importance historique majeure.
Pour autant, faut-il pour cela entreprendre des travaux d’une ampleur inouïe, et particulièrement coûteux ? Didier Rykner, directeur de la rédaction de La Tribune de l’art, ne le pense pas. Pour ce spécialiste du patrimoine architectural, rebâtir la tour Nord consisterait à produire un faux. Il estime que le projet s’apparente à du vandalisme, et qu’il n’est en outre pas conforme à la charte de Venise de 1964. Selon Didier Rykner, la destruction de la tour serait un événement historique en soi, sur lequel il ne faudrait en conséquence pas revenir. Par ailleurs, l’argent venant à manquer, les opposants au projet proposent que les moyens soient mieux répartis, et notamment utilisées à l’entretien de bâtiments qui en ont réellement besoin. Ces arguments sont de bon sens.
Difficile de trancher dans cette affaire particulièrement sensible. Un constat douloureux s’impose néanmoins à tous, et il n’a pas grand-chose à voir avec une hypothétique reconstruction de la tour Nord. Nonobstant la magnificence de la basilique Saint-Denis, celle-ci est très peu visitée. Le monument attire à peine 100.000 visiteurs par an, quand Notre-Dame de Paris en attire près de 150 fois plus, soit 14.000.000 de personnes. Pourquoi un tel écart ? La réponse est simple, et édifiante. Les abords de la basilique voient cohabiter la France historique et la France d’après, multiculturelle, donc multi-conflictuelle. De peur d’entraîner les touristes dans un guet-apens, les offices de tourisme font très peu de promotion autour de la basilique.
Le seul projet valable de réhabilitation de la basilique serait de rétablir l’ordre, et la sécurité autour. Pour cela, il faut du courage politique, et un autre logiciel que celui du communiste Didier Paillard. La fréquentation touristique de Saint-Denis n’augmentera que lorsque le département sera assaini. Assez des trafics et des voyous, qui n’ont rien à faire aux abords de la nécropole des rois de France !