Rue89 rapporte :
“(Mercredi à 19h, ndlr) Robert Ménard a réussi à transformer l’arène de la ville en gigantesque lieu de culte à ciel ouvert. Lorsque le prêtre prononce « Que le Seigneur soit avec vous », les 5 000 personnes présentes dans l’arène répondent en chœur par « et avec votre esprit ».
Les spectateurs se lèvent aussi à l’unisson et laissent planer un silence de marbre pendant les prières. Des « Halellujah » résonnent au cœur du monument. C’est une première depuis que la Féria a été créée en 1968 à Béziers.
Le prêtre tient pourtant à se vouloir inclusif, même pour ceux qui ne sont pas chrétiens :
« Nous prions pour la population biterroise dans sa diversité. »
Le religieux s’essaye aussi à la politique internationale, et évoque le sort des Chrétiens d’Irak. (…)
Cathy et Christophe, ne voient rien à redire non plus. D’ailleurs Cathy tient à répéter que cette messe est une très bonne initiative :
« C’est bien, c’est très bien. Pour une fois, ça change. »
Lorsqu’on lui demande si les musulmans biterrois ne pourraient pas se sentir rejetés par une telle cérémonie, elle est catégorique :
« La France est chrétienne non ? Bon alors je ne vois pas où est le problème. »
Deux hommes d’une cinquantaine d’année descendent à leur tour l’escalier de pierre qui mène aux gradins. Eux aussi se réjouissent, mais pas pour les mêmes raisons :
« Bon ça va, elle n’a pas duré 100 ans sa messe. »
Elodie et David, la trentaine, sont tout aussi enthousiastes que Cathy et Christophe. Pour eux, ceux qui ne sont pas satisfaits ou pas à l’aise avec la tenue d’une cérémonie religieuse sont libres :
« Celui qui n’est pas content reste dehors. »
Beaucoup de spectateurs croisés dans les couloirs qui mènent à la sortie du monument partagent cette opinion. La messe est ouverte pour ceux qui le veulent, les autres peuvent boycotter, mais inutile d’en faire toute une histoire.
Abdel revient du Maroc, où il a passé ses vacances. La polémique lui passe au-dessus de la tête. Il acquiesce lorsque qu’on lui demande s’il s’en contrefiche : « Ça ne me dérange pas, moi. »
Roselyne, une retraitée à l’allure très soignée, voit les choses un peu différemment :
« On est dans un pays à dominante catholique, dans 50 ans ce sera peut-être différent. Il faut affirmer notre croyance. »
Dans ses propos on entrevoit les théories du « grand remplacement » :
« Ces croyances ne disparaîtront pas mais on sera minoritaires. Dans 50 ans, pas maintenant. »
Ménard quitte l’arène, entouré d’une quasi-haie d’honneur qui l’acclame comme une rock star après un concert réussi.
Un groupe de femmes d’une cinquantaine d’années se tient juste devant la sortie de l’arène. Elles ont toutes fait l’effort de porter de très belles robes de soirée pour l’occasion. Isabelle ne rejette personne, et « n’est pas contre la laïcité ». Mais elle précise tout de même que « quand on va quelque part on s’adapte ». Avant d’ajouter :
« Il faut arrêter de baisser le pantalon. On nous parle tout le temps des mosquées, et dès que nous on organise une messe chrétienne il y a un scandale. Non. On est dans un pays chrétien. »
A la Bodega d’en face, les deux Florian et leurs amis sirotent tranquillement une bière et du Ricard. L’un des deux Florian, le plus petit, qui a l’allure d’un rugbyman, est assez philosophe :
« C’est bon la messe, ça fait plaisir aux vieux. Ou bien ça occupe les femmes quand on reste avec le jaune. »
Recroisé plus tard dans la soirée, Florian explique pourquoi il soutient Ménard. Pour lui, le centre-ville s’est beaucoup dégradé et il était nécessaire de changer de cap pour retrouver une vie nocturne digne de ce nom :
« Béziers, c’est devenu de la merde. Moi je fais la fête à Narbonne depuis longtemps. »
Aucun Biterrois rencontré après la messe n’a condamné l’atteinte à la laïcité que dénonçaient pourtant plusieurs cadres de gauche le matin même. Tous ont unanimement salué un retour à une tradition qui commençait à s’effriter. Même le Midi Libre s’est montré dithyrambique au lendemain de la messe publique des arènes :
« On a vu des concerts de rock réunir moins de personnes dans les arènes de Béziers. »
L’opposition locale est quasi invisible. C’est à Paris que les voix se sont élevées le plus fort, pas dans la région.
Quelques opposants très engagés existent pourtant, comme Claude Zemmour, conseiller régional de gauche, ou l’Union citoyenne et humaniste Jean Moulin, qui veille à signaler et condamner tous les dérapages du nouveau maire. La messe fait partie de ces dérapages graves, selon Christophe Coquemont, l’un des trois cofondateurs de l’Union citoyenne :
« En parlant d’une messe, Robert Ménard oppose une religion à toutes les autres. C’est illégal puisque opposé à la loi 1905. »
Pour les membres de cette association, « cette messe est une étape supplémentaire », qui leur fait craindre le pire.
Cyril Henrion, autre cofondateur de l’Union, est tout aussi inquiet. Tous soulignent une léthargie politique totale des habitants de Béziers, et même d’élus de la droite républicaine, face aux décisions pourtant polémiques du nouveau maire.
Elie Haboud, député UMP de l’Hérault, avait même fait le déplacement pour assister à la messe de Ménard, selon Christophe Coquemont.”
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