Vers une industrie de la procréation sans limite!

Un enfant peut désormais vivre hors du sein maternel les deux premières semaines après sa conception et quand il a atteint 23 ou 24 semaines… Qu’en sera-t-il du lien mère-enfant si l’on parvient à lui faire passer toute sa vie « intra-utérine » loin de sa mère ?

1979. La féministe américaine Ti-Grace Atkinson clame que « l’acte sexuel devrait cesser d’être le moyen employé par la société pour renouveler la population ». Car la maternité artificielle aurait ce triple avantage de libérer les femmes d’une maternité ­qu’elle juge oppressive, d’offrir un incroyable champ de recherches et d’expérimentations scientifiques et laisse entrevoir la perspective d’une humanité normée, sélectionnée, délivrée de toute pathologie, voire même de la mort. Bref, le tri sélectif et la politique du zéro déchet appliqués aux ordures… et aux humains.

Un « progrès ? »

Les rumeurs se font de plus en plus fortes : Facebook et d’autres grandes entreprises américaines financent la congélation des ovocytes de leurs salariées pour leur permettre de travailler plus longtemps sans renoncer à leur désir d’enfant. Les recherches sur l’utérus artificiel progressent et les scènes dépeintes par Aldous Huxley dans Le Meilleur des mondes paraissent de plus en plus réalistes. Complot ? Paranoïa ?

Aujourd’hui, sur les 280 jours que dure une grossesse normale, un enfant peut en passer 160 hors du sein maternel : dans le cas d’une fécondation in vitro, l’enfant est conçu dans une éprouvette dans laquelle il passera les 5-6 premiers jours de son développement. Les progrès en matière de prise en charge des enfants prématurés permettent, à l’autre bout de la chaîne, d’assurer la survie d’un fœtus hors du sein maternel à partir de 23 ou 24 semaines. Reste à relier les deux bouts, à reconstituer les conditions favorables au développement de la vie humaine entre la 2e et la 23e semaine de grossesse.

Un défi pour la science

Cette idée, vieille comme le monde, de l’idée du sombre, du mystérieux, du caché associée à celle de l’utérus n’est toujours pas à reléguer au rayon des mythes et antiquités. Les recherches vont bon train aux quatre coins du monde, mais reconstituer précisément toute la complexité du placenta, organe nécessaire au développement de l’embryon, est un vrai défi pour la science. Comment assurer à la fois l’alimentation, l’hydratation et l’évacuation du dioxyde de carbone et des déchets métaboliques ?

Pour autant, avant la naissance du premier bébé éprouvette en 1978 en ­Grande-Bretagne, la conception d’un enfant dans un tube à essai semblait inconcevable. Nul doute que l’utérus artificiel verra le jour, même s’il est difficile de dire quand.

Illusoire, donc, de se prémunir de cette terrifiante perspective par un simple « ce n’est pas possible ! ». Et puisque l’amour de la science et celui de l’argent restent rarement éloignés, il est clair que les enfants fabriqués sur mesure en laboratoire seront vendus, stockés, soldés comme n’importe quel autre produit. Hier, nous étions l’enfant d’un père et d’une mère. Demain, ils seront les enfants d’un docteur ès sciences et d’un P.-D.G de multinationale.

Adélaïde Pouchol – L’homme nouveau

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