Le dernier projet de Benoîte Groult était de publier son « Journal d’Irlande ». Elle avait l’intention d’entrecroiser ses « Carnets de pêche » en Irlande où elle avait passé plus de vingt étés avec son mari Paul Guimard, et les passages de son Journal intime tenu conjointement. Elle avait commencé ce travail d’orfèvrerie littéraire, que la maladie et la mort l’ont empêchée de mener à son terme. C’est sa fille Blandine qui a choisi de mettre ses pas dans ceux de sa mère pour lui rendre le plus beau des hommages en la faisant revivre à travers ce livre posthume établi selon sa volonté.
Le livre se présente comme un Journal tenu durant vingt-six étés, rythmé par une quadruple dramaturgie : l’installation en Irlande, la maison que Benoîte et Paul y achètent, la vie locale avec ses figures pittoresques, la passion de la pêche, de la mer, du bateau, des produits de la pêche à cuisiner, etc. L’expérience sans fard du trio amoureux dont la matière a donné lieu à la transposition fictionnelle de son best-seller Les vaisseaux du cœur : Benoîte tiraillée entre son mari Paul Guimard et Kurt, l’amant américain rencontré en 1945 et retrouvé dans les années 60. Elle s’éloigne de Paul sans parvenir à le quitter tandis que Kurt espérera en vain qu’elle divorce pour lui.
Les visiteurs de l’été dont elle dresse un portrait saisissant de justesse et, parfois, de rosserie : ses filles et leurs maris, les amis de passage (François Mitterrand, Régis Debray, les Badinter, Tabarly, les Fasquelle…) Le temps qui passe pour une femme qui se sent vieillir et qui vit un amour platonique avec un mari de son âge et un amour charnel avec un amant plus âgé qu’elle. Benoîte a 57 ans quand elle commence ce Journal et 83 ans quand il s’achève.