« Engrosser la femelle du Front national », tel était le 8 décembre dernier le titre d’une tribune postée sur le site Le Plus (de L’Obs) et dont l’auteur, le médecin havrais Thierry Lecoquierre, postulait que « la femme frontiste » étant « nantie d’un cerveau reptilien plus proéminent que la moyenne », elle cédait à « l’homme brute qui la rabaisse », et qu’il sera donc aisé de lui faire fabriquer « une descendance crépue […] au parti d’extrême droite ».
« Ami, fais-le donc, le viol noir… »
D’où l’objurgation citoyenne lancée par le bon docteur : « Blacks, nègres, bougnoules, juifs, gauchistes, romanos, gitans, handicapés, francs-maçons et même mes gays amis solidaires : […] Haro sur la croupe offerte pour une vaste copulation altruiste ! Assurons une multicolore descendance à ce pays qui sombre. »
Si la direction du Front national, à ma connaissance, n’a pas porté plainte – non plus d’ailleurs que les organisations antiracistes et féministes, si sourcilleuses –, il semble avoir eu un formidable écho outre Rhin puisque, dans la nuit de la Saint-Sylvestre, près de six cents habitantes de Cologne ont subi les assauts de réfugiés arabes déchaînés, le même phénomène s’étant produit dans nombre de villes allemandes, ainsi qu’en Finlande dont le Premier ministre Juha Sipilä, ému comme Mamma Merkel par le drame des exilés, leur avait proposé deux semaines plus tôt sa maison de campagne.
Certains internautes s’étant ici émus de la prose du nommé Lecoquierre, la rédaction du Plus avait laborieusement expliqué qu’il fallait prendre au second degré cette facétie de carabin. Après tout, Alain Jakubowicz, président de la LICRA, avait bien déclaré le 9 octobre sur RTL qu’« on peut rire de tout, de tout le monde, tout le temps », et qu’il « regrettait d’avoir fait certains procès » car il faut « revoir notre logiciel de lutte contre le racisme et l’antisémitisme » avant d’enjoindre aux humoristes : « Lâchez-vous ! »
La Californie, laboratoire du « progrès »
Outre qu’on ne voit pas pourquoi la liberté de rire, de parler et de penser devrait être réservée aux humoristes, ceux-ci seraient bien inspirés de ne pas prendre au mot Me Jakubowicz sous peine de risquer la taule ou la camisole chimique, qui nous pend au nez.
Le quotidien londonien The Daily Telegraph signale en effet les expériences de chercheurs de l’Université de Californie qui, « en dirigeant la force magnétique vers la partie postérieure du cortex frontal, sont en mesure de réduire la croyance en Dieu et de diminuer l’intolérance envers les immigrants ». Ainsi, « une fois leur cerveau électro-stimulé, 32,8 % des personnes testées ont signalé « moins de croyance en Dieu, dans les anges, ou au ciel ». Mieux encore, 28,5 % des cobayes ont exprimé de la sympathie « envers un immigrant qui a critiqué leur pays », prouvant cette fois que « l’électro-stimulation pouvait contrer le racisme ».
Il n’est malheureusement pas encore possible d’électro-stimuler toute une population pour la rendre conforme. C’est pourquoi, dans le cadre de l’élection présidentielle américaine du 8 novembre prochain, le gouverneur démocrate du même Etat de Californie, Jerry Brown, a décidé la tenue d’un référendum sur l’interdiction de « tout propos niant l’existence des holocaustes juif, arménien ou ukrainien lorsque de tels propos sont proférés dans une école, un musée ou un établissement d’enseignement financés par l’Etat ». Si l’on peut se féliciter que l’Holodomor ukrainien (la « mort par la famine » organisée à partir de 1930 par Lazare Moïsseïevitch Kaganovitch sur les ordres de Staline) soit enfin considéré comme un génocide puisqu’il fit 6 à 7 millions de morts, l’initiative sert évidemment les intérêts de Washington qui s’acharne à détacher l’Ukraine de la Russie et à l’intégrer dans l’OTAN. Mais cela justifie-t-il une telle brèche dans le sacro-saint premier amendement à la Constitution états-unienne garantissant une liberté d’expression que l’Europe s’acharne à restreindre ?
Sous le joug des minorités
On a ainsi peu remarqué la présence au côté du candidat Alain Juppé d’un revenant dont on se croyait débarrassé : Dominique Perben. Garde des Sceaux (sous Chirac II et Raffarin), il fit adopter la loi du 30 décembre 2004 qui, portant création de la HALDE (Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité), aggravait encore les dispositions des lois Pleven et de l’« abjecte loi Gayssot » (cf. Me Baudelot, avocat du… Monde !) en alourdissant les peines pour faits de racisme et de révisionnisme et en créant le délit d’homophobie si souvent utilisé depuis, comme l’ont appris à leurs dépens Charles Vanneste et Christine Boutin entre autres condamnés.
Or, c’est ce personnage que Juppé a choisi pour l’inspirer sur les « questions régaliennes » à l’honneur dans son livre-programme Pour un Etat fort et pour en relire les chapitres relatifs à la laïcité et à l’intégration, ce qui fait craindre le pire. Car on voit bien un Juppé, par malheur élu, suivre les traces du Britannique David Cameron qui vient de décider l’adaptation du « calendrier des examens scolaires au Royaume-Uni à la période de ramadan afin de ne pas pénaliser les adolescents observant cette période de jeûne » qui se prolongera du 5 juin au 6 juillet 2016. Mesure prise, affirme le Daily Mail, pour répondre « aux exigences de la communauté musulmane d’Angleterre, toujours plus nombreuse et plus influente » puisqu’elle est aussi à l’origine de la pétition décrétant persona non grata l’Américain Donald Trump, coupable d’avoir proposé de restreindre l’accès des musulmans aux Etats-Unis. La pétition ayant recueilli plus de 600 000 signatures, les parlementaires britanniques en discuteront gravement à Westminster le 18 janvier.
Pour une Université non alignée
Dans cet asservissement général aux minorités visibles ou non et aux dogmes dissolvants, une lueur d’espoir. Le 25 décembre, sur le site de La Tribune, Jean-Christophe Gallien, professeur associé à l’Université de Paris 1 la Sorbonne, a condamné « le totalitarisme et la barbarie Made in France » s’attaquant aux crèches de Noël qui sont « de véritables sanctuaires culturels et des marqueurs identitaires partagés par de nombreux Français, et plus largement la grande majorité des Européens ». Et cela alors qu’en « un cruel paradoxe », « semaines après semaines, nos écrans télévisuels comme nos ondes radiophoniques […] sont, pour notre plus grand plaisir, remplis de voyages et de rencontres conçus comme autant d’hommages vibrants, émus et prosélytes de traditions culturelles, identitaires et religieuses d’autres territoires et d’autres peuples ».
Quelques semaines plus tôt, au moment des régionales, un autre universitaire, Laurent Bouvet, professeur de science politique à l’université de Versailles, s’était dans une tribune, publiée cette fois par francetv info, insurgé contre les manœuvres visant à « empêcher le FN d’accéder au pouvoir local suivant ses résultats, et priver la masse de ses électeurs de la représentation politique à laquelle ils auraient légitimement droit ».
Certes, deux hirondelles ne font pas le printemps mais elles témoignent d’un frémissement. Si longtemps le temple d’idéologies aussi mortifères qu’inquisitoriales, l’Alma mater va-t-elle retrouver les chemins de la véritable liberté ?
Camille Galic – Présent