Le pape François et la musique sacrée

Le 28 septembre, le Pape a prononcé un discours qui a peut-être été ignoré de beaucoup, mais qui n’en possède pas moins une très grande importance, puisqu’il abordait la question cruciale de la musique sacrée, si étroitement liée à la liturgie qu’elle devient comme elle une véritable école de spiritualité, mais une spiritualité qui passe par la voix et le chant. L’Église chante parce que le chant est une expression privilégiée de l’amour, comme l’a souvent fait remarquer saint Augustin qui disait notamment que « chanter est le propre de celui qui aime » ou encore que « chanter, c’est prier deux fois ». L’Église assume toutes les formes de l’art dans sa vie de prière (architecture, peinture, sculpture…) et la musique tout spécialement, mais pas n’importe quelle musique. Le pape cite Paul VI qui, en pleine crise rappelait que « tout n’est pas licite, tout n’est pas valable, tout n’est pas bon ». Et plus loin, le pape Paul VI surenchérissait en disant : « Qu’on laisse de côté les expressions qui ne font honneur ni au contenu sacré ni au génie de la langue italienne et qui sont vulgaires, banales, ressemblant plus à des slogans qu’à des prières ». Héritier du concile, le pape Montini entendait faire sien l’enseignement du n°116 de la constitution conciliaire sur la Liturgie qui dit expressément : « L’Église reconnaît dans le chant grégorien, le chant propre de la liturgie latine ; c’est donc lui qui, dans les actions liturgiques, toutes choses égales d’ailleurs, doit occuper la première place ». On sait ce qui est advenu.

Le pape François cite le Concile sans le nommer, quand il souligne que le chant grégorien doit être le modèle premier de toute liturgie. Ainsi, il se place dans la grande tradition musicale de l’Église, spécialement celle de saint Pie X, de Paul VI et de Benoît XVI (tous trois nommés explicitement). Il rappelle en ce sens que toute musique ne peut être liturgique, car la musique liturgique est sacrée. En effet, tout en héritant des cultures musicales qui l’ont précédée, l’Église façonna son propre univers musical, et cet univers c’est avant tout le chant grégorien, selon l’heureuse affirmation du Concile rappelé plus haut. Quelle est la raison de cette prédilection en faveur du chant grégorien ? Principalement, parce que ce chant est avant tout facteur d’éducation spirituelle. Pie XI, développant et commentant le motu proprio de saint Pie X notait : « Ces mélodies contribuèrent à favoriser la piété du peuple ». Sans citer le concile, mais en se référant à saint Pie X, le Pape rappelle à ceux qui l’auraient oublié qu’il est souverainement important que tout ce qui est destiné à la beauté de la Liturgie soit réglé par les lois et les prescriptions de l’Église. Saint Pie X voulait que l’Église prie sur du beau. Il n’entendait pas mésestimer une musique sacrée multiséculaire comme la polyphonie. Il voulait qu’en priant sur du beau, le chant sacré devienne une expression de notre joie. Comme le remarque finement le Père Abbé dom Delatte, le chant met le diable en déroute.

Le Pape encourage tout le peuple chrétien à mieux chanter pour mieux servir la liturgie et mieux adorer. Le chant fait partie intégrante de la liturgie ; il faut donc que le chant devienne vraiment participation active, par laquelle le peuple chrétien s’associe à la prière de l’Église, avec les anges qui chantent le Gloria, car il n’y a qu’une liturgie. Seule une belle musique permettra de transmettre à tout le peuple de Dieu, l’éternel message de l’Évangile. Que Marie, Mère du divin Orphée, nous aide à entrer pleinement dans le mystère de la musique sacrée.

L’Homme nouveau

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