Deux syndicats de dentistes se sont alarmés de l’inscription au tableau du conseil de l’ordre de jeunes dentistes formés au Clesi (Centre libre d’enseignement supérieur international), une école privée située à la Garde, près de Toulon.
En cause, notamment, l’arrivée dans la profession, validée par le Conseil de l’ordre des chirurgiens-dentistes du Var, de trois jeunes diplômés du Clesi. Selon Var-Matin, qui a révélé l’affaire, cette inscription au tableau du conseil de l’ordre a donné lieu à des débats au sein de l’instance départementale, mais elle a été finalement validée.
Patrick Solera, président de la Fédération des syndicats dentaires libéraux, le premier syndicat de la profession, a déclaré lundi à l’AFP avoir été «très étonné que l’Ordre considère ces diplômes comme parfaitement légaux: on a obtenu la condamnation de l’école en septembre 2016».
De fait, la cour d’appel d’Aix-en-Provence avait confirmé en septembre 2016 la fermeture de la formation dentaire du Clesi, et lui avait interdit de délivrer des cours dans le cadre de ses formations d’odontologie sur le territoire français, après une condamnation similaire en première instance en septembre 2014 à Toulon.
«Leur diplôme n’est pas conforme puisque sur leurs cinq années d’études, deux l’ont été dans une école qui a été condamnée», a renchéri auprès de l’AFP Catherine Mojaïsky, présidente de la Confédération nationale des syndicats dentaires, deuxième syndicat chez les chirurgiens-dentistes, qui dit avoir écrit aux ministres de la Santé Agnès Buzyn et de l’Enseignement supérieur Frédérique Vidal. «On est sur une tricherie manifeste», poursuit Mme Mojaïsky.
De son côté, le directeur du Clesi Bruno Ravaz assure que depuis la condamnation de l’école – qui lui interdit d’enseigner en France -, son cursus se déroule pendant 2 ans en Irlande, puis 3 au Portugal. «Ils ont des diplômes validés au Portugal, reconnus dans toute l’Europe», a-t-il ajouté auprès de l’AFP, affirmant par ailleurs qu’une «cinquantaine» d’autres jeunes diplômés – outre les trois du Var – étaient inscrits dans d’autres départements de France au registre de l’Ordre.
Selon le site internet du Clesi, l’école affirme disposer de différents campus à Toulon, Béziers, au Pays basque, à Dublin et à Lisbonne. «Le clesi ne délivre pas directement de diplômes à ses étudiants. Il est cependant partenaire de différentes universités de médecine portugaises les autorisant à délivrer leurs cours au sein de ses différents campus. Si les étudiants suivent donc tous leurs cours au Clesi, en France ou en Irlande, ils ont en réalité le statut d’étudiant portugais, et reçoivent un diplôme d’Etat Portugais à la fin de leur formation», précise le site.
«Si le public ne peut pas tout faire, il faut faire de la place au privé»
À ceux qui l’accusent de court-circuiter le système d’étude français, M. Ravaz répond: «Le système français est court-circuité tous les jours en Europe». Ce système «est allé au bout de ses possibilités» car «si le public ne peut pas tout faire, il faut faire de la place au privé», a-t-il poursuivi.
Interrogé par l’AFP, l’Ordre national des chirurgiens-dentistes (ONCD) a pour sa part indiqué ne connaître «ni le nombre, ni les noms des diplômés passés par le Clesi, inscrits au tableau de l’Ordre.»
Le conseil national de l’ordre «ne connaît que des diplômes présentés à l’occasion de la demande d’inscription au tableau». Si ces diplômes correspondent à ceux figurant au tableau établi par la Commission européenne et à l’annexe de la directive relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles, le conseil national de l’ordre «se trouve dans l’obligation, de par les textes, de les reconnaître», poursuit l’ONCD.
«L’ordre n’est pas habilité par les pouvoirs publics à contrôler le contenu d’une formation. Cette prérogative est du ressort exclusif de l’État d’origine du diplôme» ajoute-t-il.