(Photo : éditions JC Lattès)
L’écrivain belge Simon Leys est mort à Camberra, en Australie. Il avait 79 ans. Les nécrologies saluent le spécialiste de la Chine. Ce qu’il était. Mais c’est un peu court que de réduire cet esprit libre, érudit et brillant à son combat qu’il mena contre les intellectuels maoïstes français. Le sinologue était aussi un amoureux des belles lettres de Hugo à Michaux, en passant par Barthes et Orwell.
Simon Leys était sinologue, de profession et de cœur. Le grand public l’avait connu durant les années 70, grâce à des essais très critiques et documentés sur Mao et sur la Révolution culturelle comme Les Habits neufs du président Mao ou la Forêt en feu. Mais il serait presque injuste de ne retenir que ces essais magistraux et qui firent scandale. Toute sa vie, Leys participa à de nombreuses revues littéraires, et il écrivit des centaines d’articles, qu’il réécrivait parfois en livres.
Tout autant que la Chine, deux mondes passionnaient ce grand voyageur : la mer et la littérature. Souvent ces deux passions se rejoignaient et l’on pouvait alors lire des pages admirables sur Hugo à Jersey ou sur la jeunesse de Henri Michaux – matelot. C’était également un très bon connaisseur de Gide : dans Protée (Prix Renaudot Essai, 2001), il offrait aux lecteurs un abécédaire qui dévoilait toutes les facettes de l’auteur des Nourritures Terrestres – même les plus discutables. Son dernier livre, Le Studio de l’inutilité, paru en 2012, mélangeait ses trois grandes passions.
Libre, brillant, érudit, Simon Leys pouvait tout aussi bien commenter le voyage de Barthes en Chine que le dernier roman de Nabokov ; il pouvait entrainer le lecteur vers un « Orwell intime », juste avant de s’enthousiasmer pour la philosophie de Simone Weil. Sinologue touche-à-tout ? Intellectuel protéiforme ? Il est plus simple de dire que Simon Leys était un grand lettré.