Qu’un président socialiste de conseil départemental se fasse entarter, ce n’est pas un drame. Encore que l’entartage de personnalités soit une forme de contestation assez peu respectueuse des victimes, et pour tout dire agaçante et insultante. Mais quand on découvre que cet entartage était en quelque sorte subventionné, c’est-à-dire payé par nos impôts, on est en droit de penser que tout socialiste que soit le malheureux entarté, nommé Carsenac, il y a pour le moins de l’abus. Sauf que parmi les principales structures qui subventionnent, on trouve précisément celle que préside Carsenac !
Cela s’est passé l’été dernier, à Vaour, dans le Tarn. Et l’entartage subventionné a eu lieu pendant le festival annuel du spectacle burlesque. Depuis une trentaine d’années, cette toute petite commune (370 habitants) située près d’Albi est le rendez-vous des amateurs de spectacles qui se veulent burlesques.
Ce festival avait été créé à l’initiative d’une communauté de hippies, installés là depuis une trentaine d’années, derniers rescapés des utopies soixante-huitardes : amour libre, fleurs et pétards (ceux qui se fument…) dans un village aux nombreuses maisons inoccupées.
Lorsque ces hippies ont lancé l’idée d’un festival du spectacle vivant, « L’été de Vaour », les subventions sont arrivées de partout. Et du même coup le festival a pu prendre de l’ampleur, même si les spectacles qui s’y donnent sont le plus souvent de piètre qualité.
Le budget annuel du festival avoisine à présent les 300 000 euros, dont 70 000 euros versés par le seul Conseil départemental (celui que préside l’entarté), auxquels il convient d’ajouter 10 000 euros de frais de communication, épongés par le même Conseil départemental, 15 000 euros de la Direction des affaires culturelles etc. Chaque année le budget – donc les subventions – grossit, car le savoir-faire de la chasse aux subventions s’améliore.
Censure ! Punition financière !
Non loin de Vaour se trouve la ZAD de Sivens, qui correspond à une construction de barrage. Depuis l’affaire de Notre-Dame-des-Landes qui empoisonne la région nantaise, tout le monde sait ce qu’est une ZAD. C’est une « zone d’aménagement différé ». L’entarteur de l’été 2016 était un militant néostalinien venu de cette ZAD. Il faut dire que la présidente du festival était elle-même très impliquée dans cette mobilisation gauchiste. L’entartage à la tarte au yaourt du président socialiste était donc une façon musclée de lui rappeler ce que les zadistes pensaient de lui.
L’affaire aurait pu rester circonscrite à ce Landerneau tarnais si le conseil départemental n’avait décidé de réduire la subvention annuelle de 70 000 à 30 000 euros. Crime de lèse-majesté ! Censure ! Punition financière ! Les mots n’ont pas manqué pour qualifier cette horrible action de type « heures-les-plus-sombres », ayant consisté à diminuer les subventions de ceux qui vous entartent. En 2017, le festival s’est tenu du 2 au 6 août et le président Carsenac n’a pas osé s’y présenter. Une tarte, ça va, mais deux… Il a expliqué, lui, le subventionneur, qu’« il craignait que sa présence soit prise comme une provocation » (Le Monde du 6 août). Il peut néanmoins espérer, si l’an prochain sa subvention revient au niveau de 2016, être autorisé à remettre les pieds au festival. Le vice-président (PS) du département, qui le représentait, a déjà annoncé que pour sa part, il le souhaitait.
Oignez vilain, il vous poindra.