Mis à pied sans solde pendant 12 mois, Alexandre Langlois, policier, lanceur d’alerte et secrétaire général du syndicat de police VIGI, a lancé une cagnotte de soutien. Dépassant les 33.000 euros, la somme servira à aider sa famille et son syndicat afin que «la police redevienne républicaine et au service du peuple».
Le policier Alexandre Langlois, secrétaire général du syndicat de police VIGI, n’en revient pas. Lancée dans la foulée de sa suspension effective depuis le 3 juillet à minuit, la cagnotte en soutien à la famille du lanceur d’alerte dépasse déjà les 33.000 euros. Un succès qui montre un fort soutien populaire envers ce gardien de la paix apprécié des Gilets jaunes pour ses prises de positions fortes contre le gouvernement et le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner. Ce sont ces dernières qui, selon lui, lui ont valu d’être suspendu de sa fonction de policier affecté au Renseignement territorial des Yvelines pour douze mois. Une période pendant laquelle il ne recevra aucun salaire. Alexandre Langlois accuse le locataire de la place Beauvau et Éric Morvan, directeur Général de la Police Nationale, d’être à l’origine de cette décision.
«Pendant 12 mois minimum je ne vais pas avoir de salaire, ce qui va impacter la vie de ma fille 6 ans, de mon fils 2 ans et de ma femme, alors que je suis le seul salaire du foyer. En effet ma femme avait dû suspendre son activité pour s’occuper de notre plus jeune fils, suite à une naissance difficile. A l’heure actuelle, comme il va mieux, elle a pu reprendre son activité de ferme équestre en avril 2019. Cependant étant à son compte elle travaille, mais ne gagne pas encore d’argent», explique-t-il.
Et le succès a été au rendez-vous. En moins de dix jours, plus de 33.000 euros ont déjà été récoltés. C’est plus qu’une année de son salaire (29.955 euros). Raison pour laquelle le policier a décidé d’allouer les fonds supplémentaires à son syndicat afin de «continuer par tous types d’action, d’être le fer de lance du combat pour que la police redevienne républicaine et au service du peuple.» Il a livré son sentiment à Sputnik sur l’ampleur de ce soutien populaire.
Sputnik France: Vous attendiez-vous à un tel succès?
Alexandre Langlois: «Honnêtement, je ne savais pas à quoi m’attendre. Je suis content de ce succès. C’est un beau pied-de-nez à Castaner qui montre que beaucoup soutiennent une police républicaine et les valeurs que le syndicat VIGI porte. J’ai été très heureux du résultat.»
Sputnik France: Pour vous, que veut dire ce soutien populaire?
Alexandre Langlois: «Il y a une solidarité qui n’a rien à voir avec les desiderata du gouvernement. Il essaie de faire taire les lanceurs d’alerte. Dans ce cas, cela concerne la police mais dans les autres branches, c’est la même chose. Je tiens à préciser que la justice m’a d’ailleurs donné raison le 10 juillet, le tribunal de Metz m’a relaxé concernant les accusations de diffamation à l’encontre du médecin de la police nationale qui agressait sexuellement nos collègues et que nous avions dénoncé. Les Français ne sont pas dupes. Au sein de la police, beaucoup de mes collègues se sont réveillés et nous ont encouragé à continuer. Le gouvernement veut me faire taire et m’asphyxier financièrement mais finalement l’arroseur est arrosé. Monsieur Castaner est tout seul, isolé. Il ne tient que parce qu’il est à la tête du système et pas parce qu’il y a un soutien ou une adhésion des gens sous ses ordres.»
Sputnik France: Maintenant que votre année de salaire est payée, vous allez pouvoir vous servir de l’argent récolté pour mettre en place plusieurs actions. Lesquelles?
Alexandre Langlois: «En plus de la sanction disciplinaire, j’ai encore six commissions rogatoires sur le dos pour diffamation. Plutôt que de me défendre tout seul, je vais pouvoir prendre un avocat. De plus, nous souhaitons nous attaquer à la question des suicides. Cela nous tient beaucoup à cœur au syndicat VIGI. Nous souhaitons nous baser sur le procès de la direction de France Télécom qui fait l’actualité. Le parquet a requis les peines maximales pour harcèlement moral, donc un an de prison et 15.000 euros d’amende, contre les ex-dirigeants concernant 19 suicides qui ont eu lieu dans l’entreprise. Dans la police nationale, nous comptons toujours les morts causés par un management délétère. Pendant ce temps-là, les autorités sanctionnent les lanceurs d’alerte. Nous espérons inverser la vapeur, déposer plainte et aller en justice pour défendre les droits de nos collègues.»
Sputnik France: L’emploi massif de gaz lacrymogène potentiellement dangereux pour la santé lors des manifestations des Gilets jaunes est un dossier que vous suivez également de près…
Alexandre Langlois: «Cela a un intérêt encore plus collectif. Nous sommes en train d’examiner la possibilité de lancer une procédure pour intoxication et empoisonnement de nos collègues concernant l’utilisation massive de gaz CS lors des manifestations des Gilets jaunes. Si nous gagnons en tant que syndicat policier, des Gilets jaunes ou des riverains pourront, eux aussi, faire valoir leurs droits. Nous avons plusieurs idées de procédures juridiques à lancer. Nous sommes bien obligés. En interne, ils sont dans le déni et ils camouflent tout. Les actions en justice permettent non seulement de médiatiser ces affaires mais aussi d’avoir le point de vue de la justice qui, pour le moment, nous a toujours donné raison.»
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